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Airbnb au Luxembourg : les dérives pointent à l’horizon


Luxembourg, jolie ville de tourisme. Air bnb est autant un atout qu'une porte vers différentes dérives, pour accueillir les voyageurs (Photo d'illustration : Fabrizio Pizzolante).

Alors que l’application américaine est utilisée par 88 000 Luxembourgeois, le manque de législation au Grand-Duché laisse le champ libre aux dérives.

Depuis 2016, le sujet est récurent parmi les questions parlementaires adressées au ministre de l’Économie. Des députés s’interrogent sur une forme de concurrence déloyale d’Airbnb envers les hôteliers et demandent des comptes au ministre dans la mesure où, contrairement à des pays comme la France ou l’Espagne, le Luxembourg n’a pas encore légiféré sur ce nouveau mode d’hébergement.
Le ministère, qui a commandé une étude sur le sujet, a promis d’en dévoiler les résultats courant 2019.
En un peu plus de deux ans, de nombreux chiffres sur les activités d’Airbnb au Luxembourg ont circulé, l’Horesca parlant même de 250 000 nuitées, en 2017, sur le territoire luxembourgeois, via l’application. Soit autant de nuitées que les hôteliers considèrent comme un manque à gagner.
Du côté du ministère, on parle plutôt de 70 000 nuitées, soit environ 2 % des 3 millions de nuitées, toutes catégories confondues, enregistrées en 2017.

36 000 clients au Luxembourg en 2017

Contacté par nos soins, Airbnb a accepté de partager ses propres chiffres et affirme qu’avec «710 hébergements Airbnb, la plateforme a enregistré 36 000 clients au Luxembourg, en 2017». La société américaine a également précisé qu’il s’agissait essentiellement «de groupe de deux personnes, venant d’Europe et d’Amérique du Nord, restant en moyenne quatre jours au Luxembourg». Dans la mesure où une réservation est faite sur un seul nom, on peut donc supposer qu’avec 36 000 clients restant 4 jours au Luxembourg, le nombre de nuitées Airbnb se monte à 144 000, et non 250 000.
Mais, outre le nombre de clients qu’attire l’application au Luxembourg, alimentant ainsi le tourisme, les hôteliers s’insurgent sur les différences au niveau des normes. En effet, un particulier n’est pas soumis aux mêmes normes sanitaires et de sécurité qu’un hôtel.

Les agences immobilières s’invitent

Si l’argument des hôteliers peut être entendu, ils ne sont pas pour autant inflexibles sur la question. L’année dernière, François Koepp, secrétaire général de l’Horesca, avait affirmé n’être «ni anti-Airbnb ni pro-Airbnb, tout comme nous n’avons jamais demandé l’interdiction de cette plateforme, mais bien une compétition loyale. J’irais même plus loin, en affirmant que le Luxembourg aurait pu jouer un rôle important en proposant, avec Airbnb, de mettre en place une base légale, créant un terrain loyal entre les différents acteurs du secteur».
Mais dernièrement, un autre point a été soulevé, d’autant plus inquiétant dans la mesure où certaines annonces sur la plateforme n’émanent plus d’un particulier mais bien d’un professionnel de l’immobilier.

Ils louent des dizaines de logements…

Ainsi, sur l’application, on peut compter sur Nicolas, qui possède 10 chambres d’environ 12 m2 à Bonnevoie, à 52 euros la nuit. À la location, pour un résident, il faudra compter environ 650 euros pour une chambre à Bonnevoie. Un montant atteignable en 12,5 jours sur Airbnb. On peut également compter sur Daniela, qui propose 12 logements à Ehlerange, à 54 euros la nuit. Sans oublier Kyra et ses 6 logements, ou encore Tiago et ses 34 logements en sa possession sur Airbnb.
Mieux encore, des agences immobilières, comme Rooftop, sont clairement présentes sur l’application. Altéa, une autre agence immobilière luxembourgeoise, a même créé «Mybnb.lu» et propose aux particuliers ayant un bien à louer sur Airbnb de s’occuper de tout, de l’annonce à la remise des clés aux touristes en passant par le ménage, contre 18 % du prix de la location.
Bref, des offres et des services s’éloignant de plus en plus de l’esprit «Airbnb» de départ et ouvrant sur des dérives pécuniaires.
Sans une législation sur la question et avec des agences immobilières qui commencent à s’intéresser aux opportunités que peut offrir l’application, le problème du logement au Luxembourg pourrait encore se complexifier.

Jeremy Zabatta

Airbnb en faveur d’une réglementation

Depuis deux ans, le ministère de l’Économie, et plus généralement le gouvernement, se sont toujours donné le temps d’analyser la situation luxembourgeoise avant de légiférer sur la question. Si une première étude ministérielle sur le sujet doit voir le jour dans les mois à venir, le jeune député Lex Delles a laissé entendre vouloir travailler sur le sujet, afin d’arriver à une réglementation luxembourgeoise permettant un juste équilibre entre les particuliers et l’hôtellerie.
De son côté, Airbnb s’est également dit ouvert à travailler avec le gouvernement luxembourgeois. «Nous sommes toujours heureux de pouvoir travailler avec les gouvernements sur des règles claires en matière de partage du logement et d’aider les hôtes à payer leur juste part d’impôts, comme nous l’avons déjà fait avec plusieurs gouvernements dans le monde», a assuré la plateforme américaine au Quotidien.

À lire également dans notre édition papier du week-end : « Quand Airbnb s’avère utile », les témoignages de ceux qui en profitent dans un bon esprit.

Un commentaire

  1. Les hôteliers n’ont rien compris. La plupart des hébergeurs ne prennent personne pour moins de trois jours et souvent moins de une semaine. En effet, comme les prix sont plus bas que les hôtels, le prix de revient d’un nuit est trop élevé avec chauffage, nettoyage, draps à laver, etc.
    En revanche, par exemple, un stagiaire ne pourrait pas se payer trois mois d’hôtel, là où Airbnb est compétitif.

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