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[Entretien] Jenifer : « Cet album a eu un effet thérapeutique »


"Avec l’âge et le parcours, on s’accepte davantage mais on garde ses doutes. Ce manque de confiance en moi, je l’aurai toujours", confie Jenifer, artiste tout aussi lumineuse que pudique. (photo DR)

Sur les routes cette année avec deux tournées, Jenifer évoque pour nous ce huitième album « Nouvelle Page », sa passion intacte pour la scène et revient sur son parcours.

Rencontre avec une chanteuse épanouie, qui a su concilier sa vie d’artiste et sa vie de femme.

Votre dernier album s’appelle « Nouvelle Page ». C’est un nouveau départ dans votre carrière ?

Le livre reste le même mais c’est tout à fait cela. Je ne renie pas tout ce que j’ai pu faire jusqu’à présent, car je m’estime extrêmement chanceuse d’avoir pu aller sur des terrains différents à chacun de mes albums. Celui-ci est vraiment un autre point de vue car j’ai changé beaucoup de choses et notamment d’équipe. Légitimement, au bout de 18 ans de carrière, j’avais envie de changements et les étapes de la vie ont fait que j’avais besoin d’autres points de vue et de nouveautés.

Il y a eu un déclic pour cette envie ?

Je voulais retrouver ma passion, retrouver l’essentiel que j’avoue avoir perdu à un moment donné. On a tous des moments down dans la vie et j’ai eu une grosse remise en question sur pas mal de choses. La passion m’a rattrapée au galop et j’ai retrouvé le chemin des studios. C’est aussi le public qui m’a encouragé car il me manquait. Ça fait partie de moi et c’est la moitié de ma vie, c’est ma passion. C’est mon équilibre avec ma vie personnelle et mes enfants.

Quel regard portez-vous sur le lien que vous avez avec le public ?

J’ai beaucoup de tendresse pour toute leur empathie. Je sens les gens, je les vois dans la rue et ils sont autant gentils que bienveillants avec moi. Cela m’a toujours énormément touchée, et encore davantage ces dernières années. J’ai de très agréables souvenirs avec le public. J’ai eu la chance de vivre des tournées, d’écumer pas mal de scènes et c’est pour moi la plus belle des récompenses. C’est un lien indéfectible et, en quelque sorte, une histoire d’amour parfaite.

Chacun de vos albums a une couleur bien particulière. Vous les concevez comme des reflets de ce que vous vivez ?

Chacun correspond à l’humeur que j’ai eue sur le moment. J’ai toujours appris de mes rencontres et mes démarches ont toujours été très honnêtes. J’ai grandi aux yeux de tous et j’ai évolué avec mes doutes. J’ai appris ainsi, au fur et à mesure, d’où mes humeurs changeantes et différentes. Je me suis livrée à chaque album.

Du moment où l’on ressent les émotions, on peut ensuite les partager. J’ai par exemple eu pour ce disque le plaisir de retrouver des personnes avec qui j’ai déjà collaboré, avec qui je suis en pleine confiance. Je n’écris pas mes chansons à proprement parler, je suggère, j’écris des petites choses et il m’est d’autant plus important d’être entourée par des gens compréhensifs, qui ne trahissent pas celle que je suis et qui sont, en toute humilité, talentueux.

On retrouve dans cet album le côté lumineux que l’on retrouvait un peu moins sur les précédents. Vous en aviez conscience ?

Je pense que ces disques n’étaient pas moins lumineux que les autres, mais que je rendais parfois les textes sombres. Sur Paradis Secret, il y avait peut-être plus de mélancolie et de nostalgie que d’habitude mais j’avais cette humeur-là. Peut-être que je m’étais enfermée dans cela et en même temps, l’image que je renvoyais n’était pas forcément celle de la fille que je suis tous les jours. Je m’étais probablement bridée sur certains sentiments, notamment sur l’intime. Je n’acceptais pas cette mise à nu nécessaire quand on fait de la musique et que l’on interprète des chansons. En tant qu’artiste, on se doit d’être dans le partage.

Et c’est justement ce que l’on ressent sur ce disque. En aviez-vous conscience en l’enregistrant ?

Oui, et je le dois notamment à Yohann Malory, que je connais depuis un grand nombre d’années déjà. Il a une plume assez maligne. Cet album m’a effet servi d’exutoire en quelque sorte. Il a indiscutablement eu un effet thérapeutique. Il m’a fait du bien et je me suis dit qu’évidemment, il allait me permettre de retrouver les gens avec quelque chose de plus simple et de profondément honnête. J’ai cette joie de retrouver le public, la scène et ce n’était pas gagné d’avance. C’est un métier tellement aléatoire. Même au bout de 18 ans, rien n’est acquis et en même temps, c’est aussi cela qui le rend excitant.

Vous parlez de vos enfants à travers un très joli titre, « Derrière les soleils ». Une façon d’évoquer votre équilibre familial ?

Oui, c’est ma vie et cela canalise énormément les énergies. Mes enfants m’ont permis de garder une ligne de conduite et me permettent d’être totalement épanouie. Ils font partie de mon oxygène. Je partage cela avec le public et il y une notion d’échange que j’adore. J’ai beaucoup à donner et on me donne énormément aussi.

Vous parlez de doutes. C’est toujours le cas après ce que vous avez réussi ?

Avec l’âge et le parcours, on s’accepte davantage mais on garde ses doutes. Ce manque de confiance en moi, je l’aurai toujours. Je suis rassurée par les gens qui m’entourent mais je resterai une éternelle insatisfaite. Je suis pleine de remises en question. Il ne faut jamais rester sur de l’acquis et il faut toujours avoir envie de faire mieux.

Quel regard portez-vous sur votre carrière et sur le fait d’avoir réussi certainement le plus difficile dans ce métier, durer ?

Quand je regarde en arrière, c’est un conte de fées. On m’a choisie à la Star Academy, j’ai gagné, j’ai fait un album et tout s’est enchaîné extrêmement vite. J’ai vécu cela aux yeux de tous et j’aurais pu être déboussolée. Je suis restée les pieds sur Terre grâce à l’éducation que l’on m’a inculquée, à mes bases, à ma Corse, aux miens, ma famille, mes amis…

Votre public a évolué aussi et il s’est même élargi. Est-ce que vous le ressentez sur scène ?

C’est ce qui se passe sur cette tournée, je m’en rends compte. C’est très éclectique. Il y a des groupes de copains, de copines, il y a parfois la mère, la fille et même la petite-fille. C’est vraiment multigénérationnel et cela me touche énormément car je n’ai jamais vraiment eu de cible. Si cela avait été le cas, je me serais d’ailleurs confortée dans un moule et je n’aurais pas fait tout ce que j’ai fait, même les erreurs. Mais c’est cela le pouvoir de la musique, il n’y a pas de cible. Intellectualiser tout ça serait même nocif. C’est tout simplement un chemin et des rencontres.

Vous êtes revenue sur les ondes, l’été dernier, avec l’un de vos meilleurs titres, « Notre idylle », qui est rapidement devenu un tube. Cela vous a rassuré ?

Oui bien sûr. Notre idylle fait partie des dernières chansons enregistrées avec Alain Corson. C’est un garçon aussi attachant que talentueux. C’est un amoureux de la musique et il met tout son cœur dans ce qu’il fait. J’aime les gens comme ça. Nous étions arrivés à 80 chansons. C’était juste la passion, la créativité et on ne se rendait pas compte des heures qui passaient. Et je suis très heureuse de l’accueil que le public a réservé à cette chanson.

Vous abordez avec pudeur un sujet douloureux qui vous a touché directement sur le titre « Encore et encore ». Comment s’est passé l’enregistrement ?

Cette chanson a été très pénible à enregistrer mais je ne voulais pas jouer à l’autruche. Cette étape a en effet été très douloureuse pour moi et je ne pouvais pas faire comme si de rien n’était. J’ai également pensé à des gens qui pouvaient vivre le même manque que le mien. Cela m’a rassuré, peut les rassurer aussi et cela m’a fait du bien de l’inscrire. J’ai voulu dédier cette chanson à cette personne qui a beaucoup compté pour moi, et qui continue aujourd’hui. J’évoque les souvenirs joyeux aussi. Cette chanson est mon exutoire.

Autre titre très pop et très efficace, « Hey Jen », dans lequel vous taclez la presse people et les paparazzis.

Je ne voulais pas la chanter et son auteur, Tibz, a insisté. (Rires) Je ne voulais pas aborder ce sujet puis elle m’a fait pleurer, m’a fait retraverser quelques mésaventures car ce ne sont pas des gens qui m’ont fait du bien. Ce sont même des gens qui ont empiété sur ma passion. Je sais bien qu’il y a pire mais c’est pénible d’être tout le temps dans le viseur. Dans son quotidien, être épiée, dévisagée, parfois même insultée, cela peut être très violent à vivre. Je crois même que je m’étais renfermée sur moi et que cela se ressentait dans ma musique. Ils ont eu un impact qu’ils n’auraient jamais dû avoir.

On vous découvre régulièrement dans des fictions, vous êtes jurée de « The Voice », en tournée et maman de deux garçons. Comment réussissez-vous à gérer tout cela ?

C’est une question d’organisation. Je ne me dédouble pas encore. (Rires) Les enregistrements de « The Voice » se font à l’automne et un peu sur l’hiver. Ce sont des moments précis et du coup, cela m’a laissé du temps pour faire la promo de mon album et aller à la rencontre des gens. On essaie ensuite de condenser tout cela pendant les heures d’école.

Pendant la tournée, il y a parfois des semaines plus rock’n’roll que les autres où je jongle entre tout. Je ne suis  pas tous les soirs sur scène donc sincèrement, tout reste compatible. Je récupère pendant les jours off. C’est un rythme très effréné mais je fais de mon mieux, comme toutes les mamans.

Comment vivez-vous cette tournée ?

Elle est très joyeuse. C’est une tournée où je retrouve les gens et où ils ont la sensation aussi de me retrouver. C’est la fête, et je pense en toute humilité, que cela nous fait du bien à tous. Le public passe un bon moment, nous aussi, et il y a une énergie des plus positives grâce à ma nouvelle équipe. Je retrouve aussi des gens de ma première maison, Arachnée Productions. J’ai d’ailleurs une pensée pour Pierre-Yves Denisot qui nous a quittés.

Je suis entourée de jeunes gens qui ont envie de se déplacer, qui sont créatifs et mes nouvelles musiciennes par exemple, c’est moi qui suis allée les chercher. Pour certaines, c’est leur première tournée. Il y a une fraîcheur et un enthousiasme que l’on retrouve sur scène. Ça joue bien, on s’amuse vraiment et c’est une très belle aventure humaine.

Vous n’êtes entourée justement que de musiciennes pour cette tournée. Comment est née cette envie ?

Au fur et à mesure que j’enregistrais les chansons, je me rendais compte de ce que je voulais présenter sur scène. J’avais envie de changement et je trouvais qu’il y avait une sensibilité un peu plus féminine. Ce disque est aussi pour moi un retour à la pop, à quelque chose de plus frais et j’imaginais cela avec des filles. Je voulais que cette tournée soit un peu comme une soirée entre potes. Il se trouve que j’ai cherché des talents, que ce sont des filles et que j’ai craqué sur celles-ci.

Avez-vous commencé à réfléchir au prochain album ?

Oui. J’ai envie de surfer sur cette énergie très positive. Cela me donne des idées, notamment celle de retourner en studio et de me dépasser encore davantage. J’ai envie de créer, de faire des propositions artistiques et aller présenter ensuite quelque chose d’autre sur scène. Je dois déjà finir cette tournée qui me mène sur les routes jusqu’au 15 décembre alors je me freine un peu. Je me concentre sur le moment présent pour savourer à 200% tout ce qui se présente à moi.

Nikolas Lenoir

Jenifer sera en concert au Luxembourg, à L’Atelier le 14 novembre, pour la partie « Proche et intime » de sa tournée.

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