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Luxembourg : la Cité judiciaire, en mode ralenti


Malgré le beau temps hier, la cour de la Cité judiciaire est restée déserte. (Photo : Fabienne Armborst)

Le coronavirus a aussi un impact sur la justice. Les audiences publiques ont été limitées au strict minimum. Priorité aux affaires urgentes et aux procès des détenus. Et encore…

La Cité judiciaire au plateau du Saint-Esprit à Luxembourg, en temps normal, c’est une véritable fourmilière. C’est ici que convergent magistrats, enquêteurs, experts… ainsi que les justiciables et leurs avocats. Souvent à leur arrivée, le prévenu et son conseil en profitent pour concocter un dernier plan de défense autour d’un café. Tout ça, c’est terminé. Car depuis dimanche minuit, sur décision du gouvernement luxembourgeois, les bars et restaurants sont fermés.

Dès vendredi, la justice avait annoncé réduire la voilure. Comme un peu partout ailleurs, la logique est, au temps du corona, d’endiguer le plus possible les flux de personnes. Toute procédure judiciaire entraînant un énorme va-et-vient, la décision de limiter les audiences publiques au strict minimum ne surprenait donc guère.

Il n’a toutefois pas fallu attendre cette décision pour constater un changement de comportement dans l’enceinte des tribunaux. L’évolution du coronavirus trottait dans toutes les têtes depuis un certain temps. C’est plus particulièrement à la suite de l’annonce, dans la matinée de jeudi dernier, de douze infections supplémentaires – dont deux infectés sur le territoire luxembourgeois – qu’on a senti qu’une nouvelle étape avait été franchie. Si la porte principale du tribunal d’arrondissement s’ouvre automatiquement en temps normal grâce à un détecteur de mouvements, dès l’après-midi on a pu observer qu’également la porte avant le contrôle de sécurité restait grande ouverte. Dans ce dédale de portes et de couloirs, c’était déjà une poignée en moins à manipuler…

Bonjour… du pied

Certains juges aussi ont commencé à prendre des précautions au moment de la lecture du prononcé. Le prévenu a ainsi été invité à se placer, pas comme d’usage, derrière la barre, mais quelques pas en arrière. Mais, par ailleurs, dans les rangs des avocats, les prises de distance sont devenues bien palpables. C’était définitivement terminé avec les poignées de main dans les couloirs du tribunal. Entre certains confrères, c’est le bonjour… du pied qui a pris le devant…

Jeudi en début d’après-midi, ils avaient aussi reçu une circulaire «coronavirus» de six pages avec l’objectif de «réduire au maximum les déplacements des avocats au palais de justice». Ils se sont vu communiquer les numéros de téléphones pour les «refixations» devant les chambres civiles, et commerciales… Plus besoin donc de se déplacer en personne à la Cité judiciaire. Une bonne nouvelle, mais qui n’effacera pas toutes les interrogations. «Et au pénal, on peut crever?», lâchera ainsi, sans détour, un avocat face aux juges.

C’est au cours de la journée de vendredi que les mesures concrètes de la justice ont été officialisées. Du côté des tribunaux d’arrondissement de Luxembourg et de Diekirch et de la Cour d’appel, toutes les affaires pénales, à part celles impliquant des personnes détenues et celles devant être évacuées d’urgence, ont été décommandées jusqu’aux vacances de Pâques.

Ne pas donner le dernier mot au coronavirus

Et on ne parle pas des moindres. Pour n’en citer que quelques-unes, lundi après-midi, devait notamment avoir lieu le procès en appel du père de 62 ans poursuivi pour avoir abusé de ses trois filles (32 ans, 26 ans et 24 ans aujourd’hui) au Luxembourg et aux Philippines entre 2006 et 2012. En première instance, il avait pris douze ans de réclusion, dont quatre ans avec sursis. Ce mardi après-midi, la Cour d’appel devait se pencher sur l’affaire de l’ex-bourgmestre de Sandweiler Charles Unsen (72 ans) poursuivi pour prise illégale d’intérêts. Enfin, la justice a également décidé de reporter l’affaire du meurtre d’Ana Lopes.

Cela fait beaucoup d’annulations. Des annulations qui ont leur impact sur les rouages de la justice. Mais la priorité, aujourd’hui, est ailleurs : ne pas donner le dernier mot au coronavirus…

Fabienne Armborst

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