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Procès LuxLeaks (6e jour) : « On fait à Edouard Perrin un procès en sorcellerie »


Le journaliste Edouard Perrin et son avocat Me Olivier Chappuis, à leur arrivée au tribunal d'arrondissement de Luxembourg, le 26 avril. (photo JC Ernst)

Selon l’avocat d’Edouard Perrin, Me Olivier Chappuis, le parquet de Luxembourg reproche simplement à Édouard Perrin d’avoir fait son travail en cherchant à protéger ses sources.

Edouard Perrin, auteur de « nombreuses enquêtes », n’a « jamais été condamné » et n’a reçu « que des récompenses » pour son travail journalistique, a souligné d’emblée Me Chappuis, premier avocat d’Edouard Perrin à plaider, lors de l’audience du mercredi 4 mai du procès LuxLeaks. « Personne n’a attaqué l’émission Cash Investigation de mai 2012 (ndlr : sur les tax rulings du Luxembourg), et pour cause, tout était vrai. »

Le journaliste français doit répondre comme coauteur des infractions de divulgation de secrets d’affaires et de violation du secret professionnel et, comme auteur, de l’infraction de blanchiment-détention des seuls documents soustraits par Raphaël Halet.

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La complicité de vol « ne saurait être retenue » contre Edouard Perrin, puisque la Chambre du conseil a rendu une ordonnance de non-lieu en novembre 2015, a rappelé Me Chappuis, déplorant la persistance de diverses insinuations du procureur d’État adjoint, David Lentz, durant le procès. « Qu’on arrête de poser des questions insidieuses à M. Perrin ! »

« M.Perrin a tout simplement cherché à protéger sa source »

Sur le fond de l’affaire, les mails prouvent que le journaliste de l’agence Premières lignes n’a « pas contacté » ni « jamais donné d’instructions » à l’ex-employé de PwC, Raphaël Halet. Pour Me Chappuis, on reproche seulement à Edouard Perrin d’avoir proposé l’utilisation d’une boîte mail morte pour procéder à l’échange des documents. « C’est un véritable procès en sorcellerie. M.Perrin a tout simplement cherché à protéger sa source, qui avait réclamé l’anonymat dès le départ. » Et l’avocat de demander la relaxe de son client : « Toute condamnation serait une atteinte à la liberté d’expression du journaliste. »

Au passage, l’avocat parisien a relevé une anomalie dans les chefs d’accusation : « Si secret des affaires il y a, il concerne les données fiscales des multinationales, pas celles de PwC. »

« En condamnant Edouard Perrin, c’est le Luxembourg qui se condamnerait lui-même. »

Rappelant « l’importance cruciale » de l’enquête d’Edouard Perrin, qui a révélé « des milliards de pertes fiscales » pour les pays européens, Me Chappuis a interpellé le tribunal : « Que valent les petits secrets commerciaux de PwC face au droit à l’information de 500 millions de citoyens européens ? (…) En condamnant Edouard Perrin, c’est le Luxembourg qui se condamnerait lui-même. »

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Pour appuyer sa défense, Me Chappuis a lu une déclaration de soutien d’Alain Lamassoure, président de la commission spéciale TAXE, mise en place par le Parlement européen après l’affaire LuxLeaks : Edouard Perrin « a contribué à faire avancer nos travaux [et à donner] un élan salvateur à une cause fondamentale. (…) Tous les citoyens européens ne peuvent que lui en être reconnaissants. »

Le procès LuxLeaks se poursuit ce mardi 10 mai (9h-12h) avec les plaidoiries de l’avocat luxembourgeois d’Edouard Perrin, puis des deux avocats d’Antoine Deltour, avant les réquisitions du parquet.

Sylvain Amiotte

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« PwC n’a pas tout dit au juge d’instruction »

La plaidoirie de l’avocat d’Edouard Perrin a aussi une nouvelle fois mis en lumière les rapports douteux de PwC avec la procédure judiciaire. D’abord parce que le cabinet d’audit a obtenu de la justice française une ordonnance sur requête civile qualifié d’ « hallucinante » par Me Chappuis : des gens de PwC, accompagnés d’un simple huissier, ont ainsi pu perquisitionner le domicile de Raphaël Halet.

Ensuite parce que PwC n’aurait pas tout dit au juge d’instruction, selon Me Chappuis. Les échanges de mails lus par l’avocat montrent très clairement que le lanceur d’alerte a contacté le journaliste, et non l’inverse. « PwC savait dès le départ qu’Edouard Perrin n’avait absolument pas sollicité Raphaël Halet », a asséné Me Chappuis. « Ce procès est un immense malentendu car la juge d’instruction n’a pas eu tous les éléments. (…) PwC a retenu des documents. (…) La question est de savoir si ce n’est pas PwC qui aurait instrumentalisé la juge d’instruction et la fragilité de M.Halet pour mettre en cause M. Perrin. »

Edouard Perrin : « On cherche à faire peur »

Selon le journaliste inculpé, le procès LuxLeaks vise à faire peur à la fois aux lanceurs d’alerte et aux entreprises de presse tentées par l’investigation dans le milieu des affaires.

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