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L’oscarisé Alexandre Desplat crée un opéra à Luxembourg


Le Grand Théâtre propose "En silence" en première mondiale les 26 et 27 février. (photo AFP)

Auteur de plus d’une centaine de bandes originales, auréolé de nombreux prix – dont deux Oscars– le compositeur Alexandre Desplat fait aujourd’hui figure d’incontournable du genre. Son nouveau défi : un opéra de chambre créé à Luxembourg. Rencontre en compagnie de sa muse artistique de toujours et metteure en scène, Solrey.

La semaine prochaine, pour deux dates et en première mondiale, le Grand Théâtre propose En silence, créé sur la base d’une nouvelle de l’écrivain japonais Yasunari Kawabata, qui a inspiré un opéra au duo Desplat-Solrey. Une œuvre épurée à voir – et à vivre – comme une vraie expérience scénique, partagée pour le coup par les locaux de l’ensemble Lucilin.

Comment cette nouvelle de Kawabata, En silence, s’est-elle imposée à vous deux?

Alexandre Desplat : J’ai adoré le recueil de nouvelles, et celle-ci, en particulier. Et avec un tel titre, En silence, autant dire que pour deux musiciens, ça commençait bien… (Il rit.) Ce silence symbolique de l’artiste en incapacité de créer, comme le raconte Kawabata, arrivait à un moment de notre vie où nous étions confrontés à cette expérience-là. Il semblait porter en lui, disons, une résonance juste.

Solrey : Oui, cette nouvelle prend sa source dans ma vie de musicienne (NDLR : elle est violoniste), anéantie par un accident qui m’a privée de ma main gauche. Cette pièce, c’est un acte de résilience en écho à la blessure du silence de mon violon. La vie est faite d’épreuves. Il faut savoir les surmonter. (…)

Cette orientation vers l’univers de l’opéra, cela vous inquiétait-il?

A.D. : J’ai toujours eu du mal à me convaincre que je pouvais entrer dans cet univers. Par timidité, par crainte. Et l’on construit sa personnalité artistique en fonction de choses que l’on aime, et d’autres moins. C’est une question d’équilibre!

S. : Selon moi, En silence réunit les mondes auxquels on s’est confrontés durant toutes ces années. Mieux, elle associe les orientations que l’on a toujours partagées: l’épure, la simplicité, le détail, l’intimité… Cette pièce, je la vois comme un fruit qui tombe d’un arbre pour élargir le champ créatif de notre collaboration. (…)

Sortir de ses habitudes, oser l’accident du spectacle vivant, est-ce une prise de risque?

A.D. : Oui, même si j’ai passé du temps dans les théâtres à respirer, comprendre le processus de création. Je me suis rappelé que la première musique que j’ai composée était pour un spectacle de clown, où je jouais de la flûte (il rit). L’inquiétude tient surtout au fait que, pour le théâtre, on compose une musique où chaque note est entendue. Au cinéma, l’attention n’est pas la même, et le son d’un film se marie à la musique. Autant dire que là, je lâche les amarres! (…)

Le silence, comment sonne-t-il?

A.D. : Je persiste à penser que le silence n’existe pas. Même si on se tait, que l’on se bouche les oreilles, il n’y a pas de silence! Si on imagine l’absence totale de nuisance sonore, il y aura toujours un brin d’herbe qui va bouger, un oiseau qui passe, une rumeur intérieure, même… J’ai moi-même perdu ma voix alors que j’étais en train d’écrire En silence. Je ne pouvais plus m’exprimer. Même intérieurement, je ne pouvais pas grommeler, fredonner, siffler… Je me suis alors rendu compte à quel point les sons intérieurs comptaient. Le silence, c’est à nous de l’inventer. On ne peut pas le proposer. (…)

Entretien avec Grégory Cimatti

Retrouvez l’intégralité de l’interview d’Alexandre Desplat et de Sorey dans notre édition papier de jeudi.

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