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ArcelorMittal : au centre de soins des machines fatiguées


L'usinage requiert la plus grande précision : Kevin Zeimes travaille jusqu'au centième de millimètre. (Photos Fabrizio Pizzolante)

Les installations d’ArcelorMittal, il faut bien les réparer ou les remettre à neuf de temps en temps. Kevin Zeimes s’en charge.

Non, Dommeldange n’est pas une friche ! Bien qu’ArcelorMittal n’y produise plus d’acier, sans le travail des 120 ouvriers qui travaillent dans l’atelier mécanique, les autres sites ne tourneraient pas.

Ici, dans le grand hall de Dommeldange, on répare, on fraise, on usine… Bref, on remet à neuf toutes les pièces qui permettent de couler cet acier qui fait du sidérurgiste le plus grand employeur du pays depuis plus d’un siècle et demi. Derrière son immense fraiseuse, Kevin Zeimes est un pur produit de la maison. Il est tout jeune, 23 ans, mais a déjà gagné l’estime de ses collègues et de son directeur.

Il se rêvait architecte, mais a finalement pris la route du centre d’apprentissage d’ArcelorMittal, à Differdange. Ayant appris la mécanique auprès de son père dès son plus jeune âge, il s’est d’abord orienté dans cette direction, avant de voir une autre porte s’ouvrir devant lui. «On m’a proposé de venir dans l’atelier, et j’ai accepté», explique-t-il. Il s’est vite pris au jeu, au point de demander un nouveau poste qui se libérait en raison d’un départ en retraite. Ravis d’avoir un jeune homme motivé sous la main, ses supérieurs l’encouragent et le voilà qui se débrouille seul sur l’énorme fraiseuse six axes SHW. «J’ai dû apprendre à m’en servir, je me suis beaucoup documenté à la maison. On trouve tout sur internet !»

C'est ici que sont remises en état les installations d'ArcelorMittal.

C’est ici que sont remises en état les installations d’ArcelorMittal.

«Si tout n’est pas aligné, c’est foutu»

Son boulot consiste à façonner n’importe quel élément des incroyables machineries d’ArcelorMittal. Et c’est loin d’être simple. Avant de mettre la pièce sur la fraiseuse, il faut étudier les plans («et quand on a une feuille A4 pour un objet qui fait 6 mètres de haut…»), puis il faut programmer la procédure sur l’ordinateur qui guidera la machine. La précision est diabolique : on parle en dixième, voire en centième de millimètre ! En ce moment, c’est toute une chaîne d’extraction de l’acier qu’il retape. Des éléments qui proviennent de Differdange.

Il suffit d’observer les pièces toutes très soigneusement entreposées, pour se rendre compte de la complexité de la tâche. Les formes, les tailles… il y a de tout. «La plus petite doit peser une centaine de grammes quand la plus grosse fait 20 tonnes !» Mais ce n’est pas le poids, finalement, qui fait la difficulté, c’est la morphologie. «La plus compliquée, c’est la boîte à eau. Il faut tout calculer avec une grande précision, parce qu’il y a des passages qui se croisent perpendiculairement à l’intérieur du volume. Si tout n’est pas parfaitement aligné, c’est foutu.»

La complexité de la tâche, c’est justement ce qui motive Kevin Zeimes : «Mes journées ne se ressemblent pas, ce n’est pas du travail à la chaîne.» Et l’air de rien, il a une sacrée responsabilité : si toutes les lignes tournent dans les différents sites du sidérurgiste, c’est un peu grâce à lui.

Erwan Nonet

De l’artisanat plus que de l’industrie

20160615, Dommeldange, Arcelor Mittal, rue de la Cimenterie, Dossier sur la Sidérurgie, Photo Fabrizio PizzolanteLe hall de l’atelier de Dommeldange est à la dimension de ce que fabrique ArcelorMittal : c’est énorme ! Pourtant, l’atmosphère est très différente et le travail n’a absolument rien à voir avec celui des hauts-fourneaux. À observer l’activité des ouvriers, ici, on est presque davantage dans le domaine de l’artisanat que dans celui de l’industrie.

C’est bien ce qui plaît à Kevin Zeimes qui avoue prendre bien plus de plaisir à réfléchir en amont à la façon dont il va travailler sur les pièces qu’il va usiner qu’à se pencher jour après jour sur des tâches plus routinières. «Il faut que je m’adapte aux pièces que je travaille, que je réfléchisse à la meilleure façon de m’y prendre. C’est un travail intéressant», explique-t-il.

Lorsqu’il doit refaire une pièce bien particulière, il doit donc prendre de grandes précautions. «Heureusement, l’informatique nous aide, assure-t-il. Lorsque l’on programme l’ordinateur, on peut lancer un usinage virtuel pour voir si le résultat sera conforme au cahier des charges.»

On l’a compris : on est loin du marteau et de l’enclume. Ici, on façonne au moyen d’outils high-tech en visant des objectifs de précision très élevés, quelles que soient les pièces travaillées.

Emplacements à louer!

Les ateliers n’occupent qu’une petite partie d’un site très vaste qui ne demande qu’à accueillir des voisins.

Élément essentiel de l’histoire de la sidérurgie luxembourgeoise, le site de Dommeldange, au fond de la vallée de l’Alzette, a vu arriver ses premiers hauts fourneaux en 1862/1863, après que ceux d’Eich, ouverts dès 1845, ont baissé de régime. Il en a compté jusqu’à quatre, autant que de fours. Ces activités stopperont en 1927 (hauts-fourneaux) et 1950 (fours). Le lieu se consacrait dès lors exclusivement à la maintenance et à la réparation des installations des sites luxembourgeois, ce qu’il fait toujours de nos jours.

Mais aujourd’hui, les temps sont durs. De nombreux sites ont fermé et la pérennité de la présence des ateliers à Dommeldange n’est pas totalement assurée, puisqu’il y a moins de machines à entretenir. Ce qu’espère le directeur des lieux, Philipe Chapellier, c’est attirer des entreprises qui désireraient implanter une activité industrielle aux portes de la capitale et du Kirchberg. Quelques idées sont déjà sur la table, mais rien n’a encore été concrétisé.

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