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Le Benelux a freiné l’Europe sur la fiscalité


Jeroen Dijsselbloem et Jean-Claude Juncker s'apprécient, comme le montre cette photo de 2013. (archives Jean-Claude Ernst)

Vendredi, l’hebdomadaire allemand « Der Spiegel » a fait de nouvelles révélations sur les pratiques de dumping fiscal du Luxembourg, de la Belgique et des Pays-Bas. Pendant des années, ces pays ont résisté à l’Europe.

Pendant des années, les pays du Benelux ont entravé les tentatives, par le Conseil de l’UE, de bloquer les pratiques de dumping fiscal. Grâce à l’accès à des documents confidentiels issus des réunions du groupe de travail sur le code de conduite en matière de fiscalité des entreprises dans l’UE, Der Spiegel démontre que Belgique, Luxembourg et Pays-Bas ont enrayé le mécanisme pour le ralentir au maximum.

Le groupe de travail avait été mis en place en 1998, afin de lutter contre la concurrence fiscale déloyale entre les États membres de l’Union, à l’origine du scandale LuxLeaks de l’année dernière. Les documents que s’est procurés Der Spiegel avaient été mis à la disposition des membres de la commission spéciale TAXE en charge de tirer au clair l’affaire LuxLeaks. Les eurodéputés avaient alors pu découvrir, dans un cadre très strict et à huis clos, le déroulement des réunions du groupe de travail.

Dans un compte rendu d’avril 2012, un membre de ce groupe de travail a rapporté que la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg se sont opposés «fortement» à toute nouvelle discussion sur des régimes fiscaux sur les brevets. La majorité du groupe de travail était favorable pour aborder cet aspect jugé «potentiellement dangereux» par la commission, et «très controversé» par l’Allemagne et la France, selon les informations de Der Spiegel. Une majorité à laquelle n’appartenaient pas les pays du Benelux.

Jean-Claude Juncker à nouveau visé

L’agence de presse belge Belga a contacté Philippe Lamberts, coprésident du groupe des Verts au Parlement européen et membre de la commission spéciale TAXE. Pour lui, «il n’est pas étonnant que ces pays qui rivalisent d’innovation fiscale pour faire plaisir aux multinationales reproduisent ces pratiques au sein d’un groupe de travail. Il faut que des pays comme la Belgique cessent de se comporter comme les défenseurs des 1 % des actionnaires des multinationales.»

Un procès-verbal de 2010 rapporte également l’opposition des Pays-Bas et du Luxembourg à l’échange d’informations sur les rescrits fiscaux.

L’eurodéputé allemand Sven Giegold, interrogé par Der Spiegel, s’en est pris particulièrement aux actuels présidents de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, et de l’Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, pour leur «responsabilité politique dans la problématique du dumping fiscal en Europe» en tant que respectivement ancien Premier ministre luxembourgeois et ministre néerlandais des Finances.

Cette nouvelle attaque contre le Luxembourg est en tout cas la preuve que les membres de la commission spéciale TAXE n’ont pas l’intention de rendre les armes. Alors qu’ils préparent leur rapport final et savent que leur mandat ne sera pas prolongé, ils confirment leur volonté d’utiliser tous les moyens en leur possession pour tirer au clair les pratiques fiscales des États membres de l’Union.

Une nouvelle fois, Jean-Claude Juncker, Premier ministre du Luxembourg au moment des faits rapportés par Der Spiegel, est en première ligne. L’actuel président de la Commission européenne marche sur des œufs et sa volonté d’afficher un autre visage aux yeux de l’Europe ne semble plus pouvoir duper les citoyens européens.

Christophe Chohin

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