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Faire du gras sur la Grèce

Le malheur de la Grèce fait décidément le bonheur de l’Allemagne. Voilà qu’on apprend que Berlin a engrangé 3 milliards d’euros d’intérêts sur les obligations grecques depuis 2010. L’Eurogroupe avait pourtant décidé que les intérêts perçus sur la dette grecque seraient rétrocédés. Logique : plutôt que de laisser l’Allemagne avoir le beurre et l’argent du beurre sur le dos de la Grèce, autant rendre à cette dernière les intérêts qui aideront à rembourser une partie de sa dette colossale. Mais depuis 2015, date d’un bras de fer entre le Premier ministre grec, Alexis Tsipras, et l’Eurogroupe, ce transfert est gelé et l’Allemagne garde la mainmise sur le pactole.
Enfin, le pactole… S’il n’y avait que cette broutille! Car Angela Merkel oublie souvent de rappeler que l’asphyxie hellène a offert aux finances germaniques un profitable appel d’air. L’Allemagne a notamment pu réaliser des économies budgétaires de quelque 100 milliards d’euros en profitant de la politique monétaire de la BCE depuis le début de la crise grecque en 2010. L’Allemagne a également fait ses emplettes lors des privatisations concédées par Athènes en échange de l’aide européenne : on se souvient notamment du rachat par l’Allemagne de 14 aéroports régionaux grecs, dont le très touristique aéroport de Corfou. Une colonisation économique qui tait son nom…
Mais, sans dédouaner la Grèce de ses graves erreurs financières, le pire est sûrement ce discours de mère-la-morale tenu par la chancelière allemande. Un discours totalement déplacé dès lors qu’on se rappelle de l’histoire économique de son pays. Car ne serait-ce qu’au XXe siècle, l’Allemagne a été trois fois en faillite! En 1953, par exemple, l’accord de Londres permet à la République fédérale d’Allemagne d’effacer plus de la moitié de sa dette d’avant et d’après-guerre. L’Allemagne a visiblement oublié que si elle a pu se relever il y a un demi-siècle, pendant que le reste de l’Europe pansait ses plaies laissées par la guerre, c’est au détriment de ses créanciers qui ont alors décidé de tirer un trait sur l’ardoise… L’un d’eux était la Grèce. Qui le regrette peut-être aujourd’hui.

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