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La récré est-elle vraiment finie ?

La Commission européenne a adopté la semaine dernière les préconisations du plan BEPS, une initiative de l’OCDE. Le but? Faire trembler les multinationales qui, par de multiples montages financiers et jeux sur les fiscalités avantageuses de certains pays, dont le Luxembourg, arrivent à optimiser, ou plus concrètement, à réduire le montant de leurs impôts. L’Europe est donc enfin décidée à montrer les dents face aux multinationales qui, sans gêne, arrivent à s’acquitter d’un impôt outrageusement bas par rapport au chiffre d’affaires et aux bénéfices réalisés.

Mais l’Europe ne le fait pas par bonté de cœur ou par excès de moralité. Les experts s’accordent sur le fait que l’optimisation fiscale représente un manque à gagner pour les États, de 90 à 210 milliards d’euros. Une somme colossale alors qu’elle serait la bienvenue dans les budgets de tous les États membres. L’ensemble des ministres des Finances des 31 pays signataires de l’accord sur le BEPS, Pierre Gramegna en tête, et les commissaires européens ont dit «avoir sonné la fin de la récréation» avec ce fameux plan BEPS. Naïf et utopiste est celui qui pense cela. Si le plan BEPS est bel et bien une avancée, il n’est en aucun cas une victoire, même si les sociétés d’audit, où règne le «Big Four» (PwC, KPMG, Deloitte et EY), affichent une mine défaite, sans doute pour mieux tromper l’opinion publique. Ces spécialistes de l’optimisation fiscale ont deux, voire trois coups d’avance sur la lente législatrice qu’est l’Europe qui, elle, dépend en partie de ces mêmes multinationales pour faire tourner l’économie. C’est révoltant, mais avons-nous une autre alternative?

Et d’un point de vue individuel, peut-on s’insurger et renoncer à travailler pour une multinationale qui fait sciemment de l’optimisation fiscale ou encore un cabinet d’audit qui a fait de ce procédé un argument d’excellence lors de la prospection de nouveaux clients? La réponse est malheureusement négative et encore plus dans un contexte où le marché de l’emploi se porte mal. Si l’Europe a sonné la fin de la récréation, ce n’est pas pour autant que les élèves vont rentrer dans le rang.

Jeremy Zabatta (jzabatta@lequotidien.lu)

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