Accueil | Editoriaux | Neutralité mémorielle

Neutralité mémorielle

Dans quatre jours, cela fera 100 ans que la Grande Guerre est finie, un conflit qui aura fait en l’espace de seulement quatre ans environ 40 millions des morts, blessés ou disparus (dont un peu moins de 10 millions de morts), décimés par un milliard d’obus tirés pendant les combats.

La guerre 14-18 paraît aujourd’hui très lointaine, voire même au bord de l’oubli. Il faut dire que les hommes et les femmes ayant connu cette époque se font de plus en plus rares au fur et à mesure que le temps passe. Pour ne pas laisser le sacrifice de ces hommes et de ces femmes, qui, elles, ont joué un rôle aussi important que les soldats dans les tranchées, aux oubliettes, il existe de nombreux musées et monuments un peu partout dans les territoires touchés par la guerre. Mais est-ce suffisant pour expliquer aux plus jeunes ce conflit, alors qu’aujourd’hui pour «connaître l’histoire», il suffit de lire une page Wikipédia.

Surtout, est-ce suffisant pour faire comprendre aux gens la stupidité des causes de ce conflit sanglant. Mais encore faudrait-il que les «élites» et les «politiques» du pays s’intéressent au sujet. Si le Luxembourg resta neutre lors du conflit et ne connaîtra pas de bataille sanglante comme à Verdun, le pays sera tout de même occupé par l’empire allemand. Une occupation qui fera indéniablement des victimes. Mais est-ce que cela justifie le peu de commémorations par la classe politique nationale alors que le président français est en train de réaliser une «itinérance mémorielle» unique afin que la Grande Guerre ne tombe pas dans l’oubli ? Certains verront cette initiative comme de la récupération ou de la communication politique.

Mais c’est également, à l’heure où l’Europe est secouée par une tendance nationaliste nauséabonde, le meilleur moment de montrer aux plus jeunes les conséquences de la pensée des extrêmes, de la peur de son voisin ou tout simplement de la folie des hommes lorsqu’ils refusent le dialogue et se referment sur eux-mêmes.

En attendant, sur l’agenda actuel du gouvernement, la Grande Guerre n’existe pas. En même temps, on ne peut pas négocier son futur poste ministériel, partir en vacances et commémorer un vulgaire conflit qui s’est déroulé aux portes du pays. À bien y réfléchir, le pays était neutre, donc gardons cette neutralité mémorielle.

Jeremy Zabatta

PUBLIER UN COMMENTAIRE

*

Votre adresse email ne sera pas publiée. Vos données sont recueillies conformément à la législation en vigueur sur la Protection des données personnelles. Pour en savoir sur notre politique de protection des données personnelles, cliquez-ici.