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Réseau de stupéfiants nigérian à la frontière : au moins 12 ans requis contre le chef


D'après l'enquête, la base arrière du trafic de cocaïne se trouvait à Longwy, au 9 rue Pierre-Albert-Labro. Plusieurs revendeurs assuraient tous les jours le passage de la frontière luxembourgeoise. (photo Le Républicain Lorrain/René Bych)

Le 13 décembre 2016, les autorités françaises et luxembourgeoises avaient arrêté les sept prévenus, âgés de 32 à 49 ans. La présumée tête du réseau était interpellée alors qu’elle se rendait à Rodange en bus.

« Ils formaient une association de malfaiteurs. Car il y avait clairement une hiérarchie entre eux. Il y avait le chef, le sous-chef et les autres étaient les exécutants qui recevaient les instructions. » Au fil de son réquisitoire lundi après-midi, la représentante du parquet a égrené le rôle des différents prévenus.

À la différence des avocats de la défense, le ministère public estime qu’il y a suffisamment d’éléments dans le dossier pour retenir la circonstance aggravante que les prévenus ont vendu et mis en circulation les grandes quantités de drogue au sein d’une structure organisée. À l’exception d’un prévenu vivant à Bereldange (L), tous auraient activement participé à ce trafic de cocaïne qui avait sa base arrière à Longwy (F) : la marchandise était préparée dans la cité lorraine avant d’être vendue au Grand-Duché. Plusieurs revendeurs assuraient tous les jours le passage de la frontière

Au cours de l’instruction, les prévenus ont tenté de minimiser leur implication. Ils contestent avoir fait partie d’une quelconque structure. «Jamais, je n’ai été le chef de quiconque», a ainsi clamé le principal prévenu Jerade S., à la barre de la 7e chambre correctionnelle la semaine passée. Or selon la représentante du parquet, ce dernier se trouvait bien à la tête de ce réseau nigérian et avait un rôle prédéfini entre mars 2015 et le 13 décembre 2016, jour de son arrestation : «C’est lui qui s’occupait de l’approvisionnement auprès de fournisseurs hollandais. C’est lui qui louait l’appartement à Longwy où était ensuite préparée la marchandise. C’est lui qui organisait la logistique en donnant les instructions pour le prix et la quantité des boules ainsi que les lieux à desservir…»

Difficile de trouver des circonstances atténuantes, estime la représentante du parquet. Car déjà en 2008, il a écopé de cinq ans de réclusion pour trafic de drogue au Grand-Duché. Il avait été renvoyé au Nigeria. Cela ne l’a pas empêché de recommencer. Le parquet a fini par requérir au moins douze ans de réclusion et une amende contre Jerade S.

Près de 50 000 euros en un an et demi

En dessous du «chef», la représentante du parquet place le «sous-chef» : Ajah I. Dix ans de réclusion et une amende ont été requis contre le trentenaire qui vivait également avec Jerade S. à Longwy : «Il avait un rôle très important : importer la drogue au Luxembourg. Selon les écoutes téléphoniques, il s’y rendait presque tous les jours. À côté, il avait son propre trafic dont il tirait ses propres bénéfices.» En se basant sur les déclarations des consommateurs, les enquêteurs avaient calculé qu’en un an et demi, il avait vendu de la cocaïne pour 50 000 euros. Les 46 jours où il se trouvait sur écoute avaient également permis d’établir qu’il avait demandé qu’on lui prépare 677 g de cocaïne pour une contre-valeur estimée entre 26 000 et 28 000 euros.

Enfin, contre les cinq autres prévenus de cette affaire, le parquet réclame six ans de réclusion et une amende. À l’exception du dernier prévenu, tous étaient colocataires dans le fameux appartement à Longwy. L’un s’était notamment vu confier le business en l’absence du chef, un autre était spécialisé dans la préparation des boules de cocaïne…

«C’était efficace, lors d’une commande d’un client, il suffisait d’envoyer un homme de l’autre côté de la frontière», constate la représentante du parquet. Un autre élément, selon elle, que les prévenus ont commis les infractions au sein d’une association de malfaiteurs est leur langage codé. «Quant au téléphone, ils parlaient de la ligne de bus n°10, il était question de 10 grammes», illustre-t-elle.

Prononcé le 8 février

Le dernier des prévenus n’a jamais habité à Longwy. Il a été arrêté en flagrant délit à Bereldange. Lui aussi a tenté de minimiser son trafic. Lors de la perquisition à son domicile, 113 g de cocaïne avaient été découverts sous la palette de sa machine à laver. Les enquêteurs avaient également saisi 9 500 euros. À titre de comparaison, au cours de l’opération policière à Longwy avaient été saisis 332 g de cocaïne, 514 g de produits pour couper la drogue et 11 920 euros en liquide.

Même si le trentenaire a effectué un certain nombre de commandes auprès de Jerade S. à Longwy, la parquetière estime qu’il n’y a pas d’élément dans le dossier permettant de le relier aux autres membres du réseau. Vu l’envergure du trafic et la quantité trouvée à son domicile, il mériterait la même peine – six ans de réclusion et une amende – que les autres prévenus. Un indice qu’il aurait exploité un grand trafic serait en effet son train de vie : «À l’époque, il n’avait pas beaucoup de revenus légaux. Mais il pouvait se louer un appartement à Bereldange et voyager en business class en avion. C’est clair que l’argent provenait du trafic de drogue.»

Le tribunal rendra son jugement le 8 février.

Fabienne Armborst

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