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Réforme des retraites en France : les syndicats vent debout


En adoptant un «âge pivot» de départ à la retraite, le gouvernement s'est aliéné un des rares soutiens à la retraite par points, le président du syndicat réformiste CFDT, Laurent Berger (photo : AFP).

La mobilisation en France contre la réforme contestée des retraites, qui paralyse les grandes villes du pays, est entrée jeudi dans sa deuxième semaine et pourrait s’amplifier, au lendemain de la présentation du projet par le Premier ministre, vivement critiquée par l’ensemble des syndicats.

Fin des régimes spéciaux, « âge d’équilibre » à 64 ans, entrée dans le système à partir de la génération née en 1975… Le Premier ministre Édouard Philippe a détaillé mercredi le contenu du futur « système universel de retraite » par points, visant à fondre les 42 régimes de retraite actuels en France en un seul système. Pour le Premier ministre, « tout le monde serait gagnant » avec cette réforme.

Mais sitôt le plan dévoilé, la fronde syndicale s’est élargie. La « ligne rouge est franchie », a tonné Laurent Berger, numéro un du premier syndicat de France, la CFDT, à laquelle le gouvernement pouvait espérer faire accepter sa réforme. « Ma porte est ouverte, ma main est tendue », lui a répondu Édouard Philippe. Pas de quoi convaincre l’organisation réformatrice, qui a appelé ses adhérents à descendre dans la rue le 17 décembre, lors de la prochaine grande mobilisation.

« Une profonde erreur »

La CFTC et l’Unsa, autres syndicats qui s’étaient impliqués dans la concertation, ont également appelé à la mobilisation. Le syndicat FO a souhaité « renforcer la mobilisation » et le syndicat CFE-CGC a fait savoir qu’il « restait dans le camp des opposants ». Mercredi soir, Laurent Berger a demandé au gouvernement de « revenir en arrière » sur « l’âge d’équilibre ». « Voir que le compromis est à portée de main et le balayer pour une question de dogmatisme budgétaire est une profonde erreur », a-t-il déploré dans un entretien dans le journal économique Les Échos.

Il y a « de la place » pour négocier les modalités d’atteinte de l’équilibre financier du système, a affirmé jeudi le ministre français de l’Économie, Bruno Le Maire. « Il y a de la place pour la négociation, que ce soit sur la pénibilité, que ce soit sur les modalités pour parvenir à l’équilibre », a-t-il déclaré sur la chaîne France 2, appelant les syndicats, en particulier la CFDT, au dialogue.

Hôpitaux, étudiants, policiers…

La retraite est un sujet éminemment sensible en France, la population restant attachée à un des systèmes les plus avantageux au monde. Les opposants les plus virulents espèrent faire durer le mouvement et mettre le pays à l’arrêt comme lors de la longue grève de décembre 1995, qui avait fait capoter une précédente réforme des retraites. Les détracteurs du projet comptent sur l’impopularité du président français, Emmanuel Macron, pour sortir victorieux du conflit et sur le contexte déjà très tendu dans le pays, avec la mobilisation depuis plus d’un an du mouvement social des « gilets jaunes », mais aussi des mécontentements exacerbés dans les hôpitaux, parmi les étudiants, les policiers…

Jeudi, dans les transports en commun, le trafic était quasi inchangé par rapport à mercredi : un train à grande vitesse sur 4 à travers le pays, un train de banlieue en région parisienne sur 4, et une majorité de lignes de métro fermées. Seul 40 % des bus roulaient par ailleurs, selon la régie des transports parisiens RATP. Des manifestations et rassemblements locaux sont prévus de Toulouse (sud-ouest) à Paris.

À partir de la génération 1975

« Je soutiens totalement le mouvement de grève« , a réagi depuis la gare Saint-Charles à Marseille (sud-est) Arya, alors que son bus pour Nice en remplacement du train compte déjà deux heures de retard. « La retraite c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase, il y a tellement d’inégalités ».

Selon le plan dévoilé par Édouard Philippe, l’âge légal restera à 62 ans, avec « un âge d’équilibre » progressivement amené à 64 ans et « un système de bonus-malus » pour inciter à travailler plus longtemps et équilibrer les comptes du système. Coup de pouce pour la retraite minimum, prise en compte étendue de la pénibilité, revalorisation pour les enseignants, bonus pour les familles nombreuses, mise en oeuvre seulement à partir de la génération 1975, gouvernance du système confiée aux syndicats et au patronat… « On a le sentiment d’avoir donné, bougé (…). On a entendu aussi que l’État ne décidait pas tout seul », a plaidé l’entourage du Premier ministre.

La disparition des régimes spéciaux est confirmée. Mais, pour les fonctionnaires et les agents des régimes spéciaux dont l’âge légal de départ est de 52 ans, en particulier les conducteurs de la SNCF (compagnie ferroviaire nationale) et de la RATP (transports urbains en région parisienne), la réforme s’appliquera à partir de la génération 1985.

Pour le Premier ministre, « les garanties données » justifient que la grève, « qui pénalise des millions de Français, s’arrête ». A contrario, à la SNCF, la CGT-Cheminots appelle à « renforcer » la mobilisation et à la RATP, l’UNSA à l' »installer dans la durée ».

LQ/AFP

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