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Le Kirchberg, un plateau à humaniser


Certains habitants espèrent que le projet de construction de logements Op der Schleed fassent le lien entre le «vieux» et le «nouveau» Kirchberg. (illustration Alain Rischard)

Il faudra bien plus qu’une galerie marchande pour humaniser le Kirchberg. Ceux qui y vivent trouve le quartier trop grand, trop bruyant. Petits commerces et mixité sociale pourraient le sauver ?

Les années 70, c’était l’époque où les élèves de l’école européenne, boulevard Konrad-Adenauer, ramassaient les pommes laissées sur les tables à la cantine pour aller les donner aux chevaux de trait qui paissaient de l’autre côté de la chaussée. Dès la première heure de libre venue, les jeunes ados la traversaient pour se retrouver à la campagne.

Comme autre loisir, ils avaient la possibilité de filer à l’épicerie du Jean-Monnet, fraîchement sorti de terre, pour acheter les bonbons acidulés qui faisaient fureur dans le palais. Sinon, il restait les énormes tuyaux de canalisation en béton qui commençaient à joncher sur des chantiers naissants et qui servaient de planque aux jeunes du quartier pour aller fumer en cachette ou vivre leur premier flirt.

Aujourd’hui, l’école est entièrement clôturée et les lourds ardennais font partie de l’histoire. Le Jean-Monnet vient d’être démoli mais des centaines d’autres bâtiments ont transformé le plateau agricole en un quartier d’affaires moderne après l’avoir livré aux mains d’architectes audacieux. Dans l’esprit du ministre François Bausch, il s’agit maintenant de le rendre «moins ennuyeux», d’humaniser ses rues et ses boulevards. Cela commence par une offre de logements pour y mettre de l’âme. Moins de 4 000 résidents et plus de 40 000 salariés le jour, voilà ce qu’est le Kirchberg aujourd’hui.

Il faut créer du lien

Parmi les résidents, ceux du vieux Kirchberg qui ne demandent pas la lune. «Si nous pouvions avoir un kiosque à journaux et du pain frais ce serait déjà bien», nous confie Thierry, jeune retraité qui habite le «village» depuis 25 ans. Le commerce de proximité, c’est la priorité dans ce quartier, aussi bien dans le village que dans le nouveau Kirchberg, comme l’appellent les anciens. «Le dimanche matin, il n’y a pas de boulangerie ouverte tu dois prendre ton vélo et parcourir trois kilomètres pour aller jusqu’à Auchan ou tu pars dans l’autre sens pour aller au Cactus au Limpertsberg. Il te reste aussi la station-service à Eich, mais il faut remonter toute la côte», témoigne Thierry.

Certes, des progrès ont été réalisés pour humaniser le quartier depuis 25 ans. Des restaurants, des crèches, des aires de jeu pour les enfants, des espaces verts autour de la Coque, tout cela ça compte. «Je me demande comment humaniser un quartier devenu si grand, traversé par des boulevards urbains sur lesquels on circule vite. Concernant le boulevard Kennedy, je me demande comment on pourrait l’améliorer, ça restera toujours une autoroute limitée à 50 km/h», estime-t-il.

Le grand problème du Kirchberg, «c’est qu’il restera toujours un plateau», nous dit Robert, un résident des nouveaux quartiers. Cerné par des vallées, ce plateau est destiné à accueillir près de 70 000 employés et quelque 20 000 résidents alors que son accès restera toujours limité. «On ne construira pas de nouvelles routes ou de nouveaux ponts et ce n’est pas le tram et le funiculaire qui vont sauver la situation», craint-il.

«Toujours plus de bruit et de trafic»

Il reconnaît que des efforts salutaires ont été fournis pour rendre le quartier plus vivable avec ses bars et ses restaurants. Pas mal d’employés qui peuplent le quartier profitent de l’afterwork plutôt que s’engouffrer dans le trafic de la fin de journée. Le week-end, c’est plutôt désert.

«Il y a aussi toujours plus de bruit et de trafic», raconte Robert. Celui qui vit boulevard Adenauer décrit un cauchemar quotidien depuis l’arrivée du tram. «Les bus passent désormais devant chez moi où s’arrêtent des bus en partance pour Yutz comme pour tous les villages du Luxembourg et j’ignore quelle sera la situation quand le tram ira jusqu’à la gare.» Le Kirchberg, ce n’est pas Bonnevoie. «C’est assez stérile malgré tout», dit Robert.

«Humaniser, ce n’est pas ouvrir une galerie commerçante. C’est la mixité, les rencontres entre voisins, les possibilités d’être à l’extérieur le soir.» Pour l’heure, il voit surtout des centaines de bus passer devant chez lui.

Le franchissement de ces grandes artères n’est pas toujours simple à vélo non plus. Les temps d’attente sont longs et parfois la traversée se fait en deux temps. «Quand tu restes planté au milieu, ça n’a rien de drôle», témoigne Thierry, adepte de la petite reine. Plutôt que de traverser les boulevards, il préfèrerait rester côté «village». Il place beaucoup d’espoir dans le futur quartier situé en face de l’école européenne, le projet «Laangfur». Une zone résidentielle qui accueillera quelque 2 700 logements s’inscrivant dans le concept «Op der Schleed» qui atteindra au final les 4 800 appartements sur 60 hectares pour 10 000 habitants. «Cette zone pourrait créer le lien entre le vieux et le nouveaux Kirchberg. Le syndicat d’intérêt local manœuvre pour que là, au moins, on installe des commerces de proximité. C’est une chance pour urbaniser et bénéficier d’un tissu sociologique.»

Geneviève Montaigu

Un commentaire

  1. c.f. Belval et Cloche d’or. Même destin. On se croirait à Dubaï. C’est moche

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