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Verdun : 300 jours en enfer


Photo prise en 1916 de soldats français passant à l'attaque depuis leur tranchée lors de la bataille de Verdun durant la Première Guerre Mondiale. (Photo : AFP)

Le 21 février 1916, au petit matin, un déluge de feu et de fer craché par un millier de pièces allemandes (dont les terrifiantes Grosses Bertha) s’abat sur Verdun et ses alentours.

300 jours en enfer débutent, dans la boue et le froid, la peur et le sang. Bombe en tôle, capote bleu horizon et fusil Lebel contre casque à pointe, vareuse vert foncé et fusil Mauser. Il y aura au total plus de 300 000 morts et disparus, presque autant dans un camp que dans l’autre.

Verdun va devenir, dans les consciences nationales française et allemande, le symbole de la Grande Guerre, celui aussi des monstruosités du conflit, même si la bataille de la Somme (juillet-novembre 1916) fut plus meurtrière (un million de morts). Pour les Français, ce sera «la» bataille de 14-18, la seule dans laquelle aucun de ses alliés n’a pris part.

En décembre 1916, les lignes n’auront presque pas bougé de leur point de départ. A cause de cela, l’absurdité de la bataille a souvent été soulignée.

Il ne s’agit pourtant pas d’un match nul mais d’une victoire défensive française: les poilus sont parvenus à contenir les assauts répétés d’ennemis n’ayant jamais pu approcher à moins de 5 km de Verdun.

Pour les Allemands, Verdun est un «saillant» enfoncé dans leurs lignes. Leur commandant en chef, Erich Von Falkenhayn, veut donc ouvrir ce dernier verrou vers Paris. Sa méthode ? «L’artillerie conquiert et l’infanterie occupe».

Fin 1915, ils lancent une énorme préparation d’artillerie devant Verdun. L’état-major français observe ces mouvements mais considère l’endroit, boueux en hiver, avec trop de dénivelés, comme peu favorable à une attaque d’envergure.

D’ailleurs, le général en chef Joseph Joffre, préparant déjà l’offensive sur la Somme, a vidé de ses hommes les forts autour de Verdun, dont celui de Douaumont.

Au dernier moment, les Français comprennent le danger et se mettent, dans la hâte, à creuser des tranchées et à poser des barbelés. Ce qui s’avèrera très utile.

«On les aura!», lance Pétain

Ce 21 février, à l’aube, le «Trommelfeuer» (pilonnage) commence: sur une poche de quelques km2, un obus tombe toutes les 15 secondes, la terre tremble à 150 km de là, le sol s’entrouvre, l’air est vicié par les gaz toxiques.

Heures dramatiques – parfois héroïques – pour les Français, équipés seulement de 270 canons et qui voient, dès la fin de la journée, déferler les vagues de fantassins armés de lance-flammes, une première à si grande échelle.

Au centre du front, au bois des Caures, le colonel Emile Driant, député de la Meuse, à la tête d’une brigade de chasseurs, ne dispose plus le 22 que de 98 poilus sur 1 200. Mais il réussit malgré tout à freiner l’avancée de milliers d’assaillants, contribuant par sa bravoure à faire naître à l’arrière le mythe de Verdun.

Malgré les bombardements sur la rive droite de la Meuse, les troupes du Kronprinz Guillaume de Prusse ne concrétisent pas réellement leurs percées. Si elles s’emparent, le 25, de Douaumont, elles n’effectuent par la suite que de lentes avancées.

La bataille s’étend en mars à la rive gauche, avec des combats d’une violence inouïe, notamment sur la colline, bien nommée, du Mort-Homme et sur la cote 304.

Le 10 avril, les lignes françaises résistent à une attaque générale de l’armée allemande. «On les aura !», lance le général Philippe Pétain.

Deux armées épuisées

De fait, la confiance revient chez les Français. La résistance s’organise. Des renforts sont acheminés par la seule route disponible, théâtre d’une fantastique noria de camions, venant de Bar-le-Duc, qu’on appellera «la Voie Sacrée».

Au fil des semaines se met en place une guerre d’usure entre deux armées épuisées. Les photos de belligérants hébétés, accroupis dans des tranchées gorgées d’eau, de cadavres jonchant le sol, d’arbres brûlés, de terres scarifiées par les bombardements, attestent de l’omniprésence de l’horreur.

En juin, les Allemands prennent Fleury, tout près de Verdun, et le fort de Vaux, à l’issue de combats acharnés. Car les Français, dorénavant dirigés par le général Robert Nivelle, continuent de résister tant bien que mal.

Falkenhayn voulait «saigner à blanc» l’ennemi en menant une guerre «industrielle» mais il fait payer un lourd tribut à ses «Feldgrauen».

L’avancée allemande va être d’autant plus affaiblie que l’état-major doit prélever sur les effectifs de Verdun pour répondre à l’offensive de la Somme, dont le lancement avait été repoussé par les Français à cause de Verdun.

Le 2 septembre, le chef suprême de l’armée allemande, Paul von Hindenburg, ordonne à ses troupes de ne plus mener que des actions défensives. Les Français en profitent pour grignoter du terrain perdu. Douaumont est repris le 24 octobre, le fort de Vaux le 2 novembre, Hardaumont et Bezonvaux le 15 décembre.

Le 18, les hommes du 4e Zouaves, malades et boiteux, s’emparent de la ferme des Chambrettes, s’appuyant pour marcher sur leurs fusils boueux devenus inutilisables et criant : «En avant les béquillards !». L’hiver et l’état du champ de bataille ne permettent plus à l’Allemagne de contre-attaquer dans de bonnes conditions. Verdun s’achève. Pas la guerre.

AFP/M.R.

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