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Législatives : « La campagne n’a jamais cessé depuis 2013 »


"Tout le débat sur la question de la langue et de l'identité, par exemple, est loin d'être nouveau", selon le politologue Philippe Poirier. (Photo Julien Garroy)

Alors que la campagne électorale «officielle» des législatives du 14 octobre débute ce lundi, le politologue Philippe Poirier, enseignant-chercheur de sciences politiques à l’université du Luxembourg, nous livre ses clefs du scrutin.

Le contexte général de ce scrutin apparaît comme bien différent de celui de 2013, qui avait vu le gouvernement démissionner et abouti des élections législatives anticipées, à la suite du scandale du SREL. En ce sens, êtes-vous d’avis que cette campagne « officielle » sera bien plus apaisée, lisse voire terne ?

Philippe Poirier : Je crois que la campagne n’a jamais cessé depuis 2013, en ce sens qu’une partie du corps électoral luxembourgeois, que ce soit celle qui avait voté pour le CSV – ou même celle qui s’est prononcée en faveur des autres partis -, n’ont jamais considéré la coalition gouvernementale actuelle (DP-LSAP-déi Greng), comme étant tout à fait légitime ; et inversement, la partie du corps électoral, qui soutient la coalition jusqu’à présent, a toujours considéré qu’elle avait réalisé un acte historique, en excluant le CSV du gouvernement.

Chacun a joué un jeu de rôles, pendant les quatre années et demi qui se sont écoulées : celui du parti dont la légitimité avait été mise en cause – bien qu’il eut été le premier parti voté en 2013 – pour le CSV, et celui de la transformation essentielle et de la modernisation, pour les autres partis. En clair, chacun a tenté de mobiliser ses plus fidèles électeurs, de cette manière aux élections européennes de 2014, au référendum de 2015 et aux communales de 2017.

Vous estimez, donc, que les formations politiques sont en campagne depuis la fin de l’année 2013. Mais il y a tout de même eu des actes et événements, au cours de cette législature (2013-18), qui ont marqué plus concrètement le début des premières joutes et attaques, propres à toute « véritable » campagne électorale qui, par définition, est limitée dans le temps, non ?

Je suis d’avis que la campagne électorale a, en fin de compte, réellement démarré à l’automne dernier, au moment du vote du dernier budget de la législature, là où le gouvernement et les trois partenaires de coalition ont dû justifier leur action non seulement vis-à-vis des électeurs, mais aussi vis-à-vis de chacun de leur électorat (respectif). En effet, nous avons vu, dès le mois de décembre, Étienne Schneider effectuer une première « sortie », en se posant comme le ministre qui avait sans doute le plus agi et transformé – selon lui – et, donc, par ricochet, en attribuant le même crédit à son parti (LSAP).

Nous avons également vu le Premier ministre, Xavier Bettel, marquer son identité libérale auprès de son parti (DP), mais également auprès de la coalition. La campagne électorale a, donc, véritablement débuté selon un jeu de légitimation de l’action générale des trois partenaires de coalition. Cela étant, en même temps, chacun des trois partis a commencé à devoir s’attribuer sa part, dans la perspective des élections.

Les électeurs sont-ils les grandes victimes de ces manœuvres « politicardes » ?

Évidemment et je trouve cela dommageable les concernant, parce qu’en fin de compte, on oublie l’essentiel, à savoir de parler du bilan du gouvernement d’une part et d’autre part des enjeux essentiels à venir pour le Luxembourg et l’Union européenne. De plus, on élude les discussions relatives aux propositions électorales des partis et l’on oublie d’en analyser leur caractère réalisable, à savoir si ces propositions sont vraiment réelles ou, au contraire, seulement de l’ordre du discours à visée électorale.

À quel type de propositions électorales faites-vous allusion ?

Tout le débat sur la question de la langue et de l’identité, par exemple, est loin d’être nouveau. Depuis que je réalise des études pour la Chambre des députés, à savoir depuis 1999, il y a le même type de débat qui s’invite dans les campagnes électorales.

Les politiques se disent : « Ah, cette année on va parler des questions de la langue et de l’identité, on va tenter de renforcer telle ou telle chose »; et de quoi s’aperçoit-on, en fin de compte ? Suivant mes études menées pour la Chambre, que les premiers thèmes qui déclenchent le vote, en 2013, 2009, 2004 et 1999, sont en réalité les thèmes économiques. Si les questions de la langue et de l’identité prennent une certaine ampleur depuis les référendums de 2005 et de 2015, témoignages que le Luxembourg n’échappe pas à l’essentialisation de la politique rencontrée ailleurs en Europe, elles sont loin d’être aux centres des préoccupations des électeurs.

Entretien avec Claude Damiani

Interview à lire en intégralité dans Le Quotidien papier du lundi 10 septembre

 

Un commentaire

  1. Thomas Meyer

    Den Här Poirier ass dach bekannterweis déi riets Hand vun der CSV.

    Schlemm datt esou e « Politikwessenschaftler » behaapt, datt d’Dräierkoalitioun als illegitim ugesi gett. Hie misst dach wessen, datt all Majoritéit legitim ass. Och wa seng Partei dat net esou gäer gesinn huet.

    Mee da kann d’CSV dat jo mat der ADR desen Hierscht nomaachen.

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