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Mise en ligne des archives de l’administration nazie


La pègre nazie a été vaincue au Luxembourg, mais l'histoire de son administration reste très peu étudiée. (photo archives Editpress)

Les Archives nationales ont commencé à mettre en ligne une première partie de l’inventaire du fonds de l’administration nazie, qui permettra de faciliter les recherches sur la période de l’Occupation.

Une phrase célèbre dit que «l’histoire est toujours écrite par les vainqueurs». Elle soupçonne toute histoire d’être une réécriture de ce qui s’est réellement passé et d’oublier de mentionner les victimes de transformations, dont, en règle générale, on n’entend plus parler.

Or pas besoin d’écrire l’histoire pour se sentir victime du passé : dans le cas des archives de l’Occupation allemande du Grand-Duché de Luxembourg, les chercheurs sont confrontés à un fonds qui arrive directement des années 40 et qui, pour une large part, demeure très peu étudié. Il s’agit d’actes, de documents, de photos, de dessins et d’affiches issus de l’appareil bureaucratique du Gauleiter Gustav Simon, chef de l’administration civile depuis le 25 juillet 1940.

Ramené d’Allemagne par les Américains

L’historien Vincent Artuso, auteur d’un rapport sur la collaboration des autorités luxembourgeoises avec l’occupant nazi, est le dernier en date à se servir de ce fonds pour appuyer ses recherches et à en dénoncer les lacunes, allant jusqu’à comparer son travail à celui d’un chercheur sur l’Antiquité.

Car si ces archives représentent une mine d’informations pour comprendre la période de l’Occupation du Grand-Duché en vue de son intégration dans le Reich, il s’agit néanmoins d’une archive de vaincu. D’après Paul Dostert, historien et directeur du Centre de documentation et de recherche sur la résistance (CDRR), il est question de documents emportés en Allemagne, puis «ramenés au Luxembourg par des soldats américains» et dont la reconstruction aurait commencé au cours des années 70 et 80. Mais comme Paul Dostert l’a déjà noté dans sa dissertation, «les actes principaux et secrets ont été détruits» .

En effet, jusqu’en 2009, année où l’on a commencé à dresser l’inventaire, les Archives nationales disposaient d’un système de fiches internes, loin d’être exhaustif ou efficace et dont le maintien incombait à une seule personne.

Mardi enfin, on a annoncé la mise en ligne de la «première partie de l’inventaire du Fonds CdZ (Chef de l’administration civile)» sur le site des Archives nationales. L’organe chargé de la conservation des documents relatifs au fonctionnement de l’État entend ainsi «mieux répondre aux attentes des chercheurs», comme le précise un communiqué.

Cette première partie représente environ deux tiers du volume total du fonds. Répertorié dans la catégorie «histoire administrative», les archivistes ont choisi de conserver son mode de classement et notent : «Les anciennes signatures se laissent retracer sans problème.» Ils ont tout au plus «complété ou précisé certains répertoires» et subdivisé certains dossiers trop «volumineux».

Sous A, on trouve la partie principale subdivisée en cinq chapitres : l’organisation générale, l’éducation, l’économie, la confiscation du patrimoine et la propagande ainsi qu’un chapitre intitulé «postes spéciaux» (Sonderstellen). Sous B, il est question des commissaires.

Une archive qui soulève des questions

Comme le rappelle la description du fonds : «(Gustav Simon) était en charge de l’ensemble de l’administration civile. L’usage de la langue allemande devenait obligatoire dans le domaine administratif et de la vie. On ordonna la germanisation de tous les noms. Le 22 octobre 1940, la Chambre des députés luxembourgeoise, le Conseil d’État ainsi que la Commission d’administration (NDLR : en dialogue avec l’occupant) furent dissolus. Néanmoins, l’intégration totale du Luxembourg dans le Reich n’aura pas eu lieu à l’issue de la guerre.»

Si cet inventaire permettra avant tout de rendre visible les lacunes d’une archive, ce dernier continue de représenter une mine d’informations et de soulever des questions. Selon Paul Dostert, qui s’apprête à prendre sa retraite dans quelques mois, «on a peu écrit sur la politique fiscale au temps de l’Occupation», par exemple. Sauf que l’historien qui décidera de consacrer une thèse à ce sujet pourrait ne pas trouver dans ses archives ce qu’il cherche, mais il pourra toujours compter sur le soutien des Archives allemandes, tel le Bundesarchiv, situé à Berlin.

Frédéric Braun

Pour plus d’informations : www.anlux.lu

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