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« Le Dieu du carnage » au TNL : une tempête de sentiments


Malgré la table et les quatre chaises qui dominent l'avant de la scène, les comédiens ne resteront pas longtemps en place. (©Stéphanie Buchler)

Frank Hoffmann met en scène dans «son» Théâtre national du Luxembourg « Le Dieu du carnage », une pièce écrite par Yasmina Reza en 2007. A découvrir jusqu’à dimanche.

Deux couples se donnent rendez-vous dans le salon cossu, à la fois minimaliste et tape-à-l’œil, de l’un d’eux dans le but de résoudre la situation délicate entre leurs deux garçons adolescents. Ferdinand attaque Bruno. Le premier a en effet agressé le second «armé d’un bâton» et les Houillé, les parents de la victime, comptent l’écrire noir sur blanc dans un compte rendu. Alain Reille réagit immédiatement, «armé» ? L’avocat trouve le terme un peu fort.

Un différend sur le terme qui ne sera que la première brèche dans les murs de la bienséance que chacun s’impose. Alors que tout avait commencé comme un goûter bon chic bon genre, on ne peut plus poli et bienveillant, les masques vont rapidement tomber et chacun va laisser ressortir l’animal qu’il garde en son for intérieur. Si Alain Reille, avec son téléphone toujours à portée de main et son cynisme à toute épreuve, s’impose rapidement comme le plus énervant des quatre, pas un ne saura rester magnanime, bienveillant, positif… Chacun à tour de rôle s’en prend aux autres, à tous les autres – même son partenaire –, ou sera, au contraire, pris à partie par les autres.

Totalement embarqués

Comme dans le texte de Yasmina Reza, les échanges verbaux fusent. Il est logique de retrouver une mise en scène on ne peut plus nerveuse, rapide, pressée. Malgré la table et les quatre chaises qui dominent l’avant de la scène, les comédiens ne resteront pas longtemps en place. Ils utiliseront d’ailleurs tout l’espace scénique et toute la scénographie de Christoph Rasche. Devant, comme derrière ces murs, tout en transparence uniquement décorés de masques africains.

Partie en trombe, la pièce, extrêmement bien écrite, demande néanmoins aux spectateurs quelques instants de mise en condition. Au point que les premières scènes, où dans le récit tout est encore parfaitement normal, peuvent sembler inutilement surjouées; en tout cas, pour du théâtre francophone. Mais rapidement on entre dans ce pugilat verbal et psychologique, dans cette tempête de sentiments, bons ou mauvais qu’ils soient, et au fur et à mesure que les alliances se font entre les personnages, on ne peut s’empêcher de prendre parti, pour l’un, puis l’une, puis l’autre et ainsi de suite.

Reza, Hoffmann ainsi que les quatre comédiens (Valérie Bodson, François Camus, Jeanne Werner et Serge Wolf) nous embarquent avec eux. Du coup, tout passe : le chapeau-vase, le téléphone qu’on fait sonner avec la bouche et même l’absurde de certains retournements de situation. C’est surréaliste, excessif, brutal et à la fois terriblement humain !

Pablo Chimienti

Au TNL – Luxembourg. Jeudi, vendredi et samedi à 20h. Dimanche à 17h

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