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Schengen / Burmerange : une maison sans pollution intérieure, c’est possible !


Le biologiste de l'habitat Ralph Baden l'assure, les taux de pollution mesurés dans cette maison sont quasiment nuls (Photo : Claude Lenert).

La pollution de l’air intérieur de nos maisons est un important enjeu de santé. Une maison pilote a été construite à Burmerange, localité de Schengen. Parfaitement saine, elle montre qu’un autre habitat est possible.

De l’extérieur, cette maison de Burmerange ressemble à toutes ces belles et grandes bâtisses neuves et modernes. Qu’elle soit passive comme le veut désormais la loi paraît logique, mais rien ne laisse présager qu’elle soit en plus parfaitement saine. Elle est pourtant constituée de matériaux qui n’émettent aucune pollution chimique ni électromagnétique dans l’environnement intérieur, alors que dans l’immense majorité des habitations, on retrouve communément 150 polluant différents.

Cette construction saine, c’est le nid douillet de Romain et Sandra, deux enseignants qui ont été convaincus et appuyés par un spécialiste de la biologie de l’habitat Ralph Baden. Il n’en est pas à son coup d’essai : avant 2017, il avait déjà fait ce travail lors de la rénovation d’une maison de ville traditionnelle qui a fait l’objet d’un documentaire. Cette fois, le défi est différent, il s’agit d’une maison passive : «Ces maisons sont davantage hermétiques, donc le besoin de réduire les polluants est encore plus important», explique Ralph Baden certainement le seul expert du Grand-Duché.

À peine plus chère qu’une maison normale

«Des mesures ont été faites à la fin de la construction et ce sont des résultats de rêve, que ce soit dans la cuisine, dans les chambres ou les salles de bains», assure Romain, qui profite pleinement de vivre dans une maison saine. «Lorsque nous allons au restaurant en famille, nous n’avons pas le choix de ce que nous respirons, mais chez nous, quand on ferme la porte, on veut pouvoir respirer un air sain, vivre dans quelque chose de propre. C’est très agréable de vivre ici», poursuit le père de famille de jeunes enfants.

Cette famille est privilégiée, actuellement dans le pays, quasiment aucune maison ne peut se targuer de contenir un air si pur. Pourtant, selon Ralph Baden, la différence de prix pour avoir une maison saine est minime, d’environ 0,15 % selon ses calculs. Pour que cette différence ne s’envole pas, l’expert a une astuce : «Au lieu d’acheter des matériaux labellisés ou certifiés biologiques, beaucoup plus chers, mieux vaut s’y connaître. On peut tout à fait trouver parmi les fournitures traditionnelles des produits respectueux de la santé.» Cette capacité n’est pas donnée à tout le monde et Ralph Baden espère qu’un jour la population pourra bénéficier d’une banque de données avec des produits neutres pour l’environnement. Dans ce cas précis, dans le cadre de l’étude pilote, chaque matériau a été analysé pour garantir sa propreté.

Un dérivé du sarin dans l’isolation

En attendant que la population bénéficie d’une meilleure information, Ralph Baden nous donne quelques pistes d’éléments à remplacer, à commencer par les mousses d’isolation à base de polyuréthane. Ce produit contient un retardateur de flammes qui est un dérivé du sarin. Oui, on parle bien de ce fameux poison mortel qui a été utilisé dans l’attentat du métro de Tokyo (1995) ou plus récemment en Syrie. «C’est un poison qui bloque l’influx nerveux, notamment au niveau des voies respiratoires», précise le biologiste.

Bien sûr, dans nos maisons, sa concentration ne permet pas de tels dégâts, mais elle peut entraîner des toux chroniques ou de l’eczéma. «C’est une substance lipophile, c’est-à-dire qui se mélange à la graisse», indique encore Ralph Baden. «Il faut éviter toutes les substances lipophiles. C’est notamment le cas de certaines colles. Les éthers de glycol sont aussi à éviter absolument. Ce sont des conservateurs utilisés dans les peintures à base d’eau. Ils sont censés remplacer les solvants, mais ils sont tout aussi dangereux et ils mettent plus de temps à s’évaporer. Ici, nous avons fait le choix d’utiliser des peintures minérales, à la chaux ou au silicate.» C’est une peinture livrée en poudre que l’on doit ensuite mélanger à l’eau et qui est disponible dans tous les magasins de bricolage.

Des fongicides dans les silicones

Les champs électromagnétiques basse fréquence ont été supprimés grâce à des câbles blindés et tressés, un peu plus compliqués à trouver mais on peut en demander à son électricien. Les basses fréquences (différentes des hautes fréquences comme le wifi) peuvent perturber la production de mélatonine selon le biologiste. Cette hormone favorise le sommeil et la croissance et est un antidépresseur naturel.
Dans tous les silicones sanitaires très utilisés dans les maisons, en particulier dans les joints, des fongicides nocifs pour la santé sont présents : «Mais des alternatives simples existent comme le silicone alimentaire ou des joints en acrylates», indique Ralph Baden.
Pour le biologiste, les corps de métier ont joué le jeu dans ce projet. «Ils sont partants à condition qu’on leur donne les connaissances. Cela ne handicape pas leur travail.» «Mais ce n’était pas toujours évident, nuance Romain. Il a fallu faire des briefings.»
Le biologiste de l’habitat conclut : «Les projets pilotes comme celui-ci montrent que c’est faisable, que santé, écologie et modernité peuvent être réunies dans un même projet.» Pari réussi, le résultat va même au-delà de son souhait. Un livre devrait être publié prochainement ainsi qu’un documentaire fait en partenariat avec l’ASBL Akut.

Audrey Libiez

Les maux de la pollution intérieure

Des maisons étanches ont commencé à être construites dans les années 70. Cela a permis aux scientifiques de mesurer leur impact, étant donné qu’elles gardent davantage prisonniers les polluants de l’habitat. Leurs études ont pu mettre en évidence le «syndrome du bâtiment malsain», qui se traduit par une atteinte des muqueuses dans les yeux, le nez, la bouche et des voies respiratoires, avec de la toux jusqu’à l’asthme. «C’est logique, puisque ce sont les organes en contact direct avec les polluants intérieurs», souligne Ralph Baden.

«Il y a aussi énormément de problèmes neurologiques : vertiges, maux de tête, nausées… Mais ça va beaucoup plus loin : des évidences scientifiques ont émergé sur des maladies neurodégénératives. On sait que des solvants, voire des biocides, peuvent jouer un rôle dans l’apparition de la maladie de Parkinson. Il y a de fortes présomptions que l’aluminium puisse être en cause dans la maladie d’Alzheimer.» Les métaux lourds, pesticides et perturbateurs endocriniens contenus dans nos maisons pourraient également affecter notre santé. La sclérose en plaques ou certains cancers hormonodépendants seraient liés aux polluants. Des maladies nouvellement décrites comme l’hypersensibilité chimique multiple (MCS) inquiètent également.

Un commentaire

  1. On progresse enfin.

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