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Bourses d’études : les frontaliers « discriminés » au Luxembourg


L'avocat général de la CJUE estime que "la discrimination" à l'égard des étudiants frontaliers a pour objectif "d’encourager l’augmentation de la proportion des résidents titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur". (illustration Fabrizio Pizzolante)

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a été saisie du cas d’un étudiant français scolarisé en Belgique qui s’est vu refuser une bourse universitaire au Luxembourg. Ses parents, travailleurs frontaliers du Grand-Duché, ne totalisant pas au moins cinq ans d’emploi sans interruption à l’époque. Une mesure « discriminatoire », estime l’avocat général de la Cour.

André Angelo Linares Verruga, résidant à Longwy et étudiant en Belgique, avait sollicité une aide financière pour l’année universitaire 2013/2014 auprès des autorités luxembourgeoises. Elle lui avait été refusée au motif que ses parents, travailleurs frontaliers du Grand-Duché, n’avaient pas cumulé la durée requise de cinq ans minimum d’activité continue au moment de la demande.

En effet, notaient les instances décisionnaires, si la mère est salariée du Grand-Duché depuis mai 2004, elle compte une interruption de moins de trois mois entre novembre 2011 et janvier 2012. Quant au père, il a été salarié au Luxembourg entre avril 2004 et septembre 2011, ainsi que de décembre 2013 à janvier 2014. Depuis février 2014, il y est travailleur indépendant. De fait, la situation d’André Angelo Linares Verruga ne répondait pas aux critères d’attribution prévus par la loi en vigueur à l’époque.

Le jeune homme a contesté cette décision en justice, auprès du tribunal administratif de Luxembourg, lequel s’en est remis à la CJUE afin de déterminer si la condition avancée est conforme ou contraire au droit de l’Union.

Condition « ni appropriée ni nécessaire »

Dans ses conclusions rendues jeudi, l’avocat général Melchior Wathelet relève que le point de droit en question s’applique « uniquement aux non-résidents qui, le plus souvent, ont une nationalité autre que la nationalité luxembourgeoise ». Il estime par là-même que « la loi luxembourgeoise établit une discrimination fondée sur la nationalité ».

Discrimination, poursuit l’avocat général, qui a pour objectif « d’encourager l’augmentation de la proportion des résidents titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur ». L’État affiche ainsi une volonté « d’assurer un niveau élevé de formation de sa population résidente et de promouvoir le développement de son économie ». Ce qui, en soi, constitue « un objectif légitime susceptible de justifier » cette différence de traitement, considère Melchior Wathelet. Toutefois, nuance-t-il, « la condition de durée de travail minimale et ininterrompue n’est ni appropriée ni nécessaire en l’espèce ».

Cette disposition ne participant au final aucunement à l’objectif susmentionné dans le cas d’André Angelo Linares Verruga : ses parents ont bien travaillé plus de cinq années consécutives avec « seulement quelques brèves interruptions » avant la demande formulée. Sur la base de ces conclusions, le Longovicien semble donc avoir subi « une discrimination injustifiée fondée sur la nationalité ».

Il appartient désormais aux juges de la CJUE d’arrêter leur décision dans cette affaire.

Le Quotidien/A.P

La loi modifiée

Melchior Wathelet précise par ailleurs que la loi luxembourgeoise a entretemps été modifiée et stipule que le travailleur frontalier doit avoir été employé au Luxembourg pendant une durée de cinq ans, au cours des sept années précédant la demande de bourse.

L’avocat général estime toutefois que « cette modification ne répond toujours pas à l’exigence de proportionnalité requise » et constitue une législation nationale contraire au droit de l’Union.

L’équivalent d’une prestation familiale pour L’OGBL

L’OGBL n’a pas tardé à réagir aux conclusions rendues par l’avocat général. Dans un communiqué diffusé jeudi après-midi, le syndicat rappelle « qu’il a toujours soutenu, devant toutes les juridictions, que le travail dans un autre pays donne droit de façon inconditionnelle à des droits sociaux qui doivent être les mêmes pour tous les travailleurs ».

L’OGBL note aussi un flou dans la législation sur l’aide financière accordée aux étudiants qui « correspond sous tous ses aspects à une nouvelle prestation familiale », mais n’est pas considérée comme telle. En ce sens, il « appelle le gouvernement à enfin mettre en place un dispositif solide », sur une base légale « qui mettrait fin à toutes les incertitudes actuelles ».

Un commentaire

  1. JE E PERMETS JUSTE de faire remarquer que le RU a negocié des prestations sociales différenciés pour les étrangers alors la CJUE est bien gentille (pour ne pas dire hypocrite)

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