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Esch 2022, plus politique que culturelle


Xavier Bettel et Vera Spautz se sont congratulés le jour de l'obtention du label. Une unité de façade. (Photo Alain Rischard)

Esch, capitale européenne de la Culture en 2022, ce n’est pas encore garanti. D’abord, il faudra mettre d’accord les partenaires, qui veulent tous en tirer un avantage.

Toute la difficulté de mettre en place l’année culturelle Esch 2022 va résider dans la capacité ou non de faire travailler ensemble 11 communes du sud du pays et le ministère de la Culture. Car Esch 2022, ce n’est pas Luxembourg et ses deux années culturelles qui limitaient à deux le nombre de partenaires, la Ville et l’État. Sauf peut-être en 2007… mais où, déjà, avec la Grande Région, des difficultés étaient apparues entre les politiques.

Dans le cas d’Esch 2022, politiquement, ça ne va pas être simple, et financièrement non plus. Cette semaine, plusieurs médias se sont émus du sort réservé aux deux coordinateurs du projet, Andreas Wagner et Janina Strötgen, qui ont travaillé d’arrache-pied pendant un an pour livrer un dossier de candidature (bid book) salué par le jury européen. Leur contrat, qui s’achève fin décembre, pourrait être reconduit pour six mois seulement.

Ce n’est pourtant pas l’avenir des deux artisans du dossier de candidature qui pose le plus gros problème aux élus communaux et au ministère. C’est même, pour l’heure, le cadet de leurs soucis. Après la liesse déclenchée par la désignation d’Esch comme capitale européenne de la Culture, les bourgmestres des communes Pro-Sud ont voulu être davantage impliqués dans le projet, car, après tout, on leur demande de débourser 12 millions pour boucler le budget, en plus des 10 millions qu’investit la seule commune d’Esch-sur-Alzette. En tout, l’année culturelle de 2022 a été chiffrée à 70 millions d’euros, dont 40 millions à la charge de l’État.

Pour que ça marche, tout le monde a intérêt à s’entendre. Or, dès le lendemain de la fête, les choses ont commencé à se gâter. Les élections ont fait valser les têtes et la présidente de l’ASBL organisatrice, Vera Spautz (LSAP), a cédé sa place de bourgmestre d’Esch à Georges Mischo (CSV). Et ça change tout.

La nouvelle équipe en place à Esch (CSV–DP–déi gréng) a repris le flambeau de l’ASBL avec un Georges Mischo secondé par l’échevin à la culture Pim Knaf (DP) aux commandes. Il y a bien une association constituée, mais seules les communes de Differdange, Dudelange et Esch y sont représentées alors que le projet englobe dix autres communes du Sud qui veulent avoir leur mot à dire.

L’après Vera Spautz

La commune d’Esch aurait monopolisé les discussions. Vera Spautz relogée sur le banc de l’opposition, les communes semblent mieux disposées à travailler ensemble. Mais déjà elles se plaignent de n’avoir aucune réponse à leurs questions. Pire, elles se plaignent non seulement de l’absence d’une structure organisatrice forte et représentative, mais encore de l’absence de concept et de plan de financement.

Ce qui est plus surprenant puisque le jury a validé précisément le concept Remix du dossier de candidature, qui contient également un plan de financement. Le même jury qui préconise à la politique de ne pas se mêler du concept artistique.

Les bourgmestres pensaient y trouver les projets précis qui se dérouleraient dans leur commune et combien cela leur coûterait. C’est ce qui se met en place maintenant. Raison pour laquelle tout le monde avait bien conscience, en novembre dernier, lors de l’obtention du label, que le travail allait sérieusement débuter.

Le dossier de candidature ne dit pas clairement aux communes combien elles devront allonger. Et c’est ce qu’elles veulent savoir. Et, surtout, quel profit elles pourront en tirer. Pour l’heure, personne parmi les décideurs ne semble avoir compris le dossier de candidature et son concept, à part le jury européen. Et, bien sûr, les artistes, dont certains ont déjà commencé à travailler pour l’année culturelle 2022 et qui attendent la suite. Car les comptes ont été gelés, les factures ne sont plus payées. Il faut d’abord mettre de l’ordre dans les affaires. Et, surtout, mettre tout le monde d’accord. Cela risque de prendre du temps.

On voit mal dès lors comment le projet pourrait se poursuivre. Si le concept même pose problème, il faudra alors qu’il soit repensé. Par une nouvelle équipe ? Sans doute. Le ministère, alors qu’il n’y est pas tenu, veut repasser un appel d’offres pour un seul coordinateur.

Les bourgmestres, eux, aimeraient avoir un droit de regard sur ce qui se fait. De quoi ébranler l’indépendance artistique recommandée par le jury européen dans son rapport. Pour l’heure, les trois bourgmestres d’Esch, Differdange et Dudelange ont eu la charge de structurer l’association, de lancer une campagne de sensibilisation avec les différentes communes participantes et de développer un plan de financement.

Le conseil d’administration de l’ASBL doit se réunir le 12 décembre. On en saura plus alors sur l’avenir d’Esch 2022. Quant au ministre de la Culture, Xavier Bettel, il nous a avoué ne pas s’occuper du dossier laissé entièrement à la charge de son secrétaire d’État.

Geneviève Montaigu

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