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Pour le procureur de Metz, le secret des sources des journalistes a été violé dans l’affaire LuxLeaks


Le journaliste Edouard Perrin assigne PWC devant le tribunal de Metz. (photo AFP)

Le journaliste Édouard Perrin assigne en référé PWC Luxembourg devant le tribunal de Metz. Il demande la rétractation de l’ordonnance qui a permis à PWC d’identifier l’une de ses sources dans la révélation du scandale fiscal LuxLeaks. En cause, une perquisition menée le 28 novembre 2014 au domicile lorrain du lanceur d’alerte Raphaël Halet. L’affaire sera plaidée mardi matin.

L’ordonnance établie en novembre 2014 à la demande de PWC Luxembourg était «de nature à porter atteinte directement et indirectement au secret des sources des journalistes sans motif légitime», affirme le procureur de la République de Metz, Christian Mercuri, dans des conclusions que Le Quotidien a pu consulter.

Il fonde ses arguments sur l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’Homme et sur la loi française sur la presse. Le procureur conclut à la rétractation de l’ordonnance, «en ce qu’elle a violé sans motif légitime la règle du secret des sources des journalistes». Cela entraîne «la nullité des constatations réalisées», écrit le magistrat, dont les conclusions rejoignent celles des défenseurs d’Édouard Perrin et de Raphaël Halet, le lanceur d’alerte qui s’est joint à la procédure du journaliste.

Fait rare dans une affaire au civil, le procureur s’est directement saisi du dossier. À Metz, le sujet LuxLeaks, déjà très médiatisé, est d’autant plus sensible que l’ordonnance dénoncée avait été validée par l’ancienne présidente du tribunal.

Saisie illégale

Pour le procureur de la République, PWC n’était pas en droit de demander copie des mails échangés entre leur employé Raphaël Halet et le journaliste Édouard Perrin. Le journaliste de Cash Investigation avait été poursuivi au Luxembourg sur la base de ces échanges. Il a été relaxé en première instance et en appel.

Avec Antoine Deltour, Raphaël Halet est l’un des deux lanceurs d’alerte du scandale LuxLeaks. Les deux Français, qui ne se connaissaient pas, étaient employés par PWC Luxembourg. Ils ont transmis à Édouard Perrin des documents révélant les avantageux accords fiscaux conclus entre le Luxembourg et des multinationales par l’intermédiaire de PWC.

Les mails, dont PWC avait demandé explicitement copie, avaient été récupérés lors de la saisie de l’ordinateur personnel de Raphaël Halet à son domicile lorrain. La perquisition avait été menée le 28 novembre 2014 par un huissier, des gendarmes et des dirigeants de PWC!

Dans l’intérêt général

Dans l’affaire plaidée demain devant le tribunal de Metz, le journaliste français veut que soit reconnue la faute commise par PWC et indirectement par la justice française. «Je ne veux plus que ce genre de procédure soit à nouveau utilisé pour débusquer un journaliste», avait déclaré Édouard Perrin au Quotidien, en novembre dernier. Le journaliste entend en outre obtenir réparation du préjudice qu’il a subi en étant poursuivi au Luxembourg.

Hasard du calendrier, l’affaire est plaidée mardi 9 janvier, soit deux jours avant que la Cour de cassation de Luxembourg ne rende son arrêt dans le procès intenté aux lanceurs d’alerte du scandale LuxLeaks. Contestant leur condamnation, Antoine Deltour et Raphaël Halet s’étaient pourvus en cassation car ils veulent voir reconnu leur statut de lanceurs d’alerte ayant agi dans l’intérêt général.

Fabien Grasser

Un commentaire

  1. Jérôme Dautzenberg

    Si la Justice se met à rendre la justice plutôt que défendre la normalisation par les classes dominantes, ou va-t-on ?

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