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Procès LuxLeaks : 108 eurodéputés affirment leur soutien aux lanceurs d’alerte


Raphaël Halet et Antoine Deltour seront jugés en appel du 30 novembre au 12 décembre prochain, à Luxembourg. (photo AFP)

Deux mois après le verdict en première instance du procès LuxLeaks, une centaine de députés européens ont signé une lettre de soutien adressée ce jeudi à Antoine Deltour et Raphaël Halet, les deux lanceurs d’alerte condamnés. En plus d’appeler à nouveau à une législation protectrice, les eurodéputés reviennent sur l’affaire du papier à en-tête chez PwC et le cas Marius Kohl.

Dans ce courrier signé par 108 eurodéputés (sur 751), majoritairement de gauche (socialistes et Verts, mais aucun Luxembourgeois), les parlementaires expriment leur « soutien » et leur « solidarité » à Antoine Deltour et Raphaël Halet pour « les procédures judiciaires en cours ».

« Nous saluons votre courage et votre ténacité à essayer de renverser le verdict du 29 juin », écrivent les élus européens, qui ont laissé passer les vacances estivales avant de pondre cette lettre collective. « Clairement, les Luxembourg Leaks ont eu un impact décisif sur le débat sur la transparence et la justice fiscales. Ce que souligne le Prix du Citoyen européen (ndlr : remis par le Parlement européen) décerné à Antoine Deltour. »

Inculpés pour avoir volé à leur ex-employeur PwC les données fiscales à l’origine du scandale LuxLeaks (lequel avait mis au jour l’ampleur de « l’optimisation fiscale » des multinationales en Europe via le Grand-Duché), les deux lanceurs d’alerte ont écopé d’une condamnation en première instance, le 29 juin dernier, devant le tribunal de Luxembourg (12 mois avec sursis et 1 500 euros d’amende pour Antoine Deltour, 9 mois avec sursis et 1 000 euros d’amende pour Raphaël Halet).

Ayant fait appel, à l’instar du parquet luxembourgeois, les deux Français doivent être jugés à nouveau les 12, 19 et 21 décembre prochains. Un marathon judiciaire entamé il y a bientôt deux ans, après la révélation de l’affaire LuxLeaks en novembre 2014.

« Choqués et en colère »

Dans leur courrier, les eurodéputés, parmi lesquels des militants actifs de la transparence fiscale comme les Verts Eva Joly et Sven Giegold et le député Die Linke Fabio de Masi, commentent le verdict du 29 juin : « Nous ne pouvons qu’être d’accord avec le juge Marc Thill qui a souligné dans ses délibérations que vous devriez tous deux être considérés comme des lanceurs d’alerte », écrivent-ils, soulignant que les données révélées relèvent d’un « intérêt général crucial ».

« Nous respectons bien-sûr l’indépendance de la justice luxembourgeoise, mais nous avons été en colère et choqués par votre condamnation malgré la reconnaissance de votre statut par le tribunal », poursuivent les eurodéputés. Ceux-ci affirment prendre « très au sérieux » l’absence d’une législation protégeant les lanceurs d’alerte, tant au niveau national qu’européen. Absence qui avait été mise en avant par les magistrats luxembourgeois pour expliquer leur jugement.

« Nous allons continuer à pousser pour obtenir » cette législation, « dans les mois, et si nécessaire, les années à venir », assurent les signataires, qui invitent la Commission européenne à passer aux actes.

Le papier à en-tête de PwC et Marius Kohl

Dans leur courrier, les eurodéputés reviennent aussi sur la révélation, lors du procès LuxLeaks, des « liens intimes » existants entre l’administration fiscale luxembourgeoise et PwC. Et d’espérer notamment que l’utilisation de lettres à en-tête du fisc par le cabinet d’audit – « sans aucune base contractuelle » – « fera l’objet d’une enquête par tous les moyens possibles ».

Et de souhaiter également que Marius Kohl, l’ancien préposé du fameux bureau Sociétés 6 de l’Administration des contributions directes, soit enfin « réquisitionné » pour apporter des réponses sur les pratiques du fisc luxembourgeois, qui tamponnait les accords fiscaux à la chaîne.

Invisible depuis son départ à la retraite en octobre 2013, Marius Kohl ne s’était rendu ni devant le tribunal lors du procès LuxLeaks (il avait fourni un certificat médical), ni devant la commission spéciale du Parlement européen sur les rescrits fiscaux. Se fera-t-il à nouveau porter pâle lors du procès en appel ?

Sylvain Amiotte

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